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Amour, émeute et cuisine
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  • Quelques pensées sur la civilisation, considérée dans ses aspects politiques, "philosophiques", et culinaires, entre autres. Il y sera donc question de capitalisme, d'Empire, de révolte, et d'antiterrorisme, mais aussi autant que faire se peut de cuisine.
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25 novembre 2009

La police cherche les organisateurs de la manifestation du 21 juin à Paris.

    Ce matin (jeudi 5 novembre), vers 6h, la police est venue perquisitionner un appartement à Rouen. Elle a embarqué une personne pour une audition. Les policiers (de la SRPJ de Paris) recherchent apparemment les organisateurs de la manifestation du 21 juin à Paris. Plusieurs centaines de personnes avaient manifesté ce jour-là dans le quartier des Halles. De nombreux manifestants étaient masqués, et au passage devant le siège de l’administration pénitentiaire les vitres de ce bâtiment avaient été brisées. En réponse la police avait gazé. Lors de la dispersion plusieurs personnes avaient été arrêtées et frappées au sol.

    Les policiers sont venus dans cet appartement rouennais car c’est depuis celui-ci qu’avait été créée la boîte mail du comité de soutien local. C’est l’opérateur Gmail qui a fourni ces informations à la police. La personne arrêtée est ressortie sans aucune charge contre elle. Les policiers semblaient plutôt rechercher des informations sur deux personnes : un certain Vincent et un certain Julien. Nous ne connaissons pas ces personnes aussi, si elles se reconnaissent : faites attention, camarades. Une instruction est ouverte pour "dégradations", "violences à agent" le tout en "bande organisée".

    Quelques jours après la divulgation de nouveaux éléments dans l’affaire de Tarnac, tendant à montrer que la filature de Julien et Yldune par la SDAT avait été entièrement bidonnée par les policiers, voilà donc la réponse des policiers : s’en prendre à nouveau aux comités de soutien. Minable. Et insuffisant.

Source : Soutien 11 novembre

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4 novembre 2009

Tarnac : la contre-enquête qui dérange

La défense pointe les anomalies et les contradictions des procès-verbaux de la police.

    Une enquête au point mort. Et aujourd’hui, une contre-enquête. Depuis un an, l’enquête du juge antiterroriste Thierry Fragnoli sur les sabotages des lignes TGV dans la nuit du 7 au 8 novembre 2008 n’a pas permis de découvrir d’éléments matériels confirmant l’implication des neuf jeunes installés à Tarnac, en Corrèze. Ils sont tous, à ce jour, mis en examen pour «association de malfaiteurs, destructions et dégradations en relation avec une entreprise terroriste». Julien Coupat étant poursuivi pour «direction ou organisation» du groupe.

    L’enquête n’est pas allée au-delà des premières constatations qui incriminaient Julien Coupat : sa présence en compagnie d’Yildune Lévy à proximité d’une voie sabotée, la nuit des faits. Dans une note qui doit être transmise au juge aujourd’hui, les avocats de la défense, Mes Thierry Lévy, Jérémie Assous et William Bourdon, contestent désormais les premiers éléments recueillis. Les avocats rappellent que Yildune Lévy et Julien Coupat ont été «suivis de manière continue depuis leur départ de Paris dans la matinée du 7 novembre jusqu’à leur retour dans la capitale, dans la matinée du 8 novembre». «Leur participation à ces faits», qu’ils contestent, «ne devrait pas faire de doute». «Or non seulement le doute existe, notent-ils, mais les incohérences et les anomalies dont sont émaillées les constatations des enquêteurs amènent à s’interroger sur leur crédibilité

 

    Des traces de semelles et de pneus qui ne collent pas

    Dès le 8 novembre, un technicien en identification criminelle de la gendarmerie effectue des relevés. «Le site et les voies ferrées sont protégés par une clôture métallique mesurant environ deux mètres, surmontée par un fil de fer barbelé», note Cyril C. Les portails grillagés qui permettent d’accéder au site sont intacts. Mais à droite de l’entrée nord-ouest, le grillage garde «plusieurs traces d’effractions». Il a été sectionné. De l’autre côté de la voie, des traces d’escalade sont visibles.

    Le gendarme constate aussi «la présence de traces de pneumatiques laissées par un véhicule ayant effectué un demi-tour». Il mesure. Largeur du pneu : 153 millimètres ; distance séparant l’intérieur de deux côtés opposés : 1 190 mm. Or ces traces ne peuvent correspondre à la voiture utilisée par Coupat. Les pneus de la Mercedes 250 qu’il utilisait sont larges de 200 mm, et la distance entre les roues de 1 300 mm.

    L’homme de la police scientifique découvre aussi «la présence sur ce même chemin de deux traces de semelles de chaussures». «Une trace indexée 13, longue de 245 mm» ; et une autre «indexée 14, longue de 200 mm». Or Coupat chausse du 45, ce qui correspond à une longueur de 307 mm, et Yildune Lévy du 39, soit 260 mm. Suivant les traces, le gendarme reconstitue «un cheminement montant» au sein de «l’emprise SNCF», ce qui lui permet de déduire l’itinéraire des saboteurs. Après être entrés par le portail nord-ouest et avoir circulé sur la voie, ils sont sortis en escaladant le portail nord.

    L’avis des avocats.«Les constatations du technicien ne sont pas compatibles avec celles de la surveillance. Les traces de pneumatiques et de semelles de chaussures ne peuvent correspondre ni aux pneus de la voiture surveillée ni aux chaussures des occupants

 

    Une filature en question

    Revenant sur la nuit du 7 au 8 novembre, Julien Coupat dira s’être «senti suivi» dès qu’il s’est «engagé sur des petites routes». «J’ai dû m’arrêter une dizaine de fois et faire autant de demi-tours, a-t-il dit. Il y avait quasiment un caractère de jeu à s’arrêter et à voir venir les voitures en reconnaissance.» Selon les policiers, le couple aurait circulé, le 7 au soir, sur la départementale 23 qui relie les villages de Dhuisy et de Germigny-sous-Coulombs (Seine-et-Marne) et qui passe sous la ligne TGV qui sera découverte sabotée. Après avoir mangé, et dormi quelques heures dans la voiture, au Trilport, à trente kilomètres de là, ils seraient revenus sur la même route. «Le 8 novembre, à 3 heures 50 minutes, constatons que le véhicule allume ses feux et démarre en direction de la Ferté-sous-Jouarre. Il chemine à allure normale sur la RN3, indique le procès-verbal de la SDAT. Le véhicule emprunte dans Dhuisy la direction Germigny, après un kilomètre il oblique à gauche dans la voie dans laquelle il avait été observé précédemment (près de la ligne TGV). Il est 4 heures.» Ce minutage sera repris dans d’autres procès-verbaux.

    L’avis des avocatsSelon le procès-verbal, il s’est écoulé dix minutes entre les deux points de stationnement.L’itinéraire emprunté entre les deux arrêts est également indiqué. Or la distance parcourue étant de 26,6 kilomètres, la vitesse moyenne de la voiture aurait dû être de 159,6 km/h. La voiture surveillée n’a pas pu parcourir la distance indiquée entre Trilport et le lieu des faits dans le laps de temps indiqué

 

    Des procès-verbaux discordants

    La voiture de Coupat, un vieux modèle de Mercedes, se serait donc arrêtée à proximité de la voie TGV. Coupat n’a pas confirmé ce lieu de stationnement lors de sa garde à vue. Et le juge ne l’a pas interrogé sur ce point. Coupat a déclaré être retourné à «l’un des endroits les plus reculés, à l’écart de tout, en pleine campagne», pour y «faire l’amour» avec son amie. La ligne à grande vitesse (LGV) est entourée de champs et surplombe l’horizon.

    A l’endroit où la route plonge sous la voie SNCF, il y a quatre lieux de stationnement possibles, deux de chaque côté de la LGV. Si la Mercedes s’est garée là, et les policiers suiveurs de l’autre côté de la voie, ils sont à quarante mètres tout au plus. Qu’ont-ils vu ? «A 4 heures 5 minutes, une approche piétonne des lieux nous permet de constater la présence du véhicule stationné tous feux éteints sur l’entrée de la voie de service, sise quelques mètres avant le pont de chemin de fer, indique sur procès-verbal le lieutenant de la SDAT. Il nous est impossible de distinguer si le véhicule est occupé ou non.» Un quart d’heure plus tard, la voiture repart. Les policiers semblent n’avoir rien observé.

    Pourtant, un gendarme, le lieutenant-colonel Eric G., chargé des constatations le jour des faits, dresse un procès-verbal contradictoire. Il note qu’un officier de police de la SDAT lui a déclaré dans la journée au téléphone «avoir suivi et observé un individu qui s’est stationné à l’intersection entre la D23 et la LGV Est pendant une vingtaine de minutes entre 4 heures et 4 heures 20». Mieux : «Cette personne a accédé à l’emprise sécurisée de la SNCF sans qu’il [le policier] puisse déceler ses agissements.» Cette déclaration, faite alors que les sabotages font déjà l’actualité des radios, ne sera pas été réitérée.

    L’avis des avocatsSi un individu - et pas un fantôme - avait été vu vers 4 heures du matin sur la voie ferrée à l’endroit du sabotage, cela constituerait un lien objectif entre la voiture des mis en examen et les faits. […] Le fait de ne pas mentionner cette information essentielle» est «de nature à faire douter de l’authenticité [du procès-verbal de police]

 

    le cafouillage sur la découverte de l’incident

    Après le départ de la voiture, les policiers de la SDAT auraient procédé à une «minutieuse recherche aux abords immédiats de la voie ferrée et du pont de chemin de fer», sans rien trouver. Ils seraient restés sur place trois quarts d’heure. «A 5 heures 10 minutes, constatons le passage sur la voie ferrée d’un TGV. Lorsque le train passe à l’aplomb exact du pont de chemin de fer se produit une gerbe d’étincelles accompagnée d’un grand bruit sec. Voyons la caténaire se détendre puis se retendre. Le train semble poursuivre son cheminement sans encombre.» Selon leur procès-verbal, les policiers demandent à leur état-major «d’aviser immédiatement les responsables de la SNCF». Mais ils quittent les lieux, attitude curieuse s’ils ont été témoins des faits. A 5 h 50, ils «donnent instruction» à l’équipe qui a continué la filature jusqu’au périphérique de «regagner le service». La SDAT ne semble prévenir personne immédiatement.

    De son côté, le conducteur du TGV d’ouverture de la ligne a «constaté un incident du pantographe» à 5 h 12. C’est à 8 h 22 que les services de la SNCF remarquent à Strasbourg un pendule [élément de fixation de la caténaire, ndlr] resté accroché sur le pantographe du train. A 10 h 36, les agents de maintenance sont prévenus. Et Patrick C., qui reçoit l’appel, est déjà sur la voie. Il est sorti vers 9 h 10 pour un TGV stoppé par un chevreuil… C’est donc lui qui arrive sur place à 11 h 46 seulement. Il constate que huit pendules sont décrochés, et un cassé, sur dix mètres.

    Dans la journée, les gendarmes découvrent que la police ferroviaire aurait appelé le central de sûreté vers 10 heures pour l’avertir d’un appel de l’officier de permanence de la police judiciaire à 7 h 50. «Une équipe PJ, en mission de surveillance», aurait «vu un individu piéton qui se trouvait sur la LGV à l’intérieur des emprises SNCF». Le commandement de surveillance SNCF se tourne vers le responsable de la régulation de la LGV Est. L’appel est enregistré vers 10 heures.

    «- Je t’appelle, j’ai la police qui nous a indiqué maintenant que vers 5 heures ce matin, il y aurait eu un équipage de la PJ qui aurait aperçu au niveau de Dhuisy […] une personne qui se serait avancée sur le pont, je pense qu’elle n’a rien jeté, parce que sinon on s’en serait rendu compte. C’est juste pour signaler ça, quoi : une personne a fait un aller-retour sur le pont et après, ils ont perdu la personne.

    - Ben là, écoute, je ne suis pas du tout au courant, mais vraiment pas du tout ! Ça c’est passé à 5 heures ?

    - Ouais, à 5 heures ! Il est temps qu’ils se réveillent, ils nous appellent cinq heures après, mais bon…»

    L’avis des avocatsLe signalement a été donné au plus tôt à 7 h 50 et plus vraisemblablement vers 10 heures. Les circonstances qui ont entouré le signalement de l’incident aux techniciens de la SNCF suscitent également de nombreuses interrogations. […] La PJ a tardé, sans raison connue, à informer les responsables de la SNCF

Karl Laske, dans Libération du 2 novembre 2009

10 août 2009

"L'affaire de Tarnac" continue en allemagne

"Deux autonomes berlinois et une autre de Hambourg avaient reçu des invitations à comparaître en tant que témoins, respectivement les 16 et 17 juillet, dans l’affaire dite de « Tarnac ». Ils étaient invités à témoigner contre neuf camarades (les neuf de Tarnac) dans le cadre d’un complément d’enquête du tribunal de grande instance de Paris. En novembre 2008, neuf personnes avaient été arrêtées en France sur la base des lois antiterroristes après des actions de sabotages du réseau ferroviaire lors d’un transport de déchets nucléaires et en plein pendant une grève des cheminots français."

     Des manifestations étaient organisées à Berlin et Hambourg à l’occasion de ces invitations à comparaître. À Berlin, la cinquantaine de personnes qui s’étaient réunies devant l’ambassade de France ont eu la surprise de voir débarquer un singe jaune et fringant, de la taille d’un homme — un oran-outang —, une pancarte contre le transport de déchets nucléaires fixée sur le derrière. Celui-ci se joignit à la manifestation et d’une voix manifestement féminine, prit la parole. Un quart d’heure plus tard, alors qu’il s’apprêtait à quitter la manifestation, le singe fut arrêté. Le lecteur avisé s’en doutait peut-être : sous le déguisement se dissimulait l’un des témoins. Elle fut emmenée au siège de la police judiciaire régionale de Tempelhof où elle fut détenue durant plusieurs heures. Les participants à la manifestation prirent le même chemin pour soutenir les personnes qui devaient être auditionnées.

    En vertu du §55 du code pénal, le second témoin refusa de répondre aux questions du juge et fut libéré vers 16 heures sans qu’aucune charge ne soit retenue contre lui. La personne arrêtée pendant la manifestation devait alors être entendue.

     Les deux juges allemands et les quatre juges français ont eu la surprise de la découvrir dans son costume de singe. Elle ne portait sous cet accoutrement que des sous-vêtements et les fonctionnaires préféraient encore un témoin au pelage jaune et ébouriffé qu’à moitié nue. C’est dans cette tenue qu’elle fit face durant deux heures aux juges ébahis et qu’elle refusa de faire toute déclaration.

    Tel est le récit d’une action réussie pouvant servir d’exemple quant au refus de se rendre à une convocation judiciaire. Il convient toujours de donner une réponse appropriée au théâtre étatique.

Allocutions prononcées lors du rassemblement devant l’ambassade de France :

     Mafia atomique franco-allemande : couper la liaison !!!

    Les pannes à répétition dans la centrale nucléaire de Krümmel soulignent aujourd’hui dans la presse ce qui est évident depuis des décennies pour le mouvement anti-nucléaire allemand et français : l’énergie atomique n’est pas contrôlable ! Le combat contre l’utilisation de l’énergie atomique, contre la construction de centrales nucléaires et l’exploitation d’uranium (au Canada par exemple), combat mené à de nombreux niveaux et par différents moyens, est un combat contre une technologie dangereuse pour la vie.

    La politique énergétique nucléaire au niveau international. La coopération franco-allemande en matière d’énergie nucléaire se distingue par une très longue tradition. C’est dans l’usine de retraitement de La Hague que sont conditionnés depuis les années 70 les déchets atomiques allemands avant leur transport par Castor jusqu’à Gorleben. Cela fait également trente ans que le groupe Siemens mène une collaboration étroite avec des groupes industriels français pour le développement et la construction de centrales nucléaires. L’entreprise d’État française EDF est l’actionnaire principal de EnBW, entreprise basée dans le sud de l’Allemagne et gérant plusieurs centrales nucléaires.

    Malgré de nombreuses pannes et accidents dans les centrales françaises, comme celles de Tricastin l’année dernière, ou celles de Krümmel près de Hambourg en ce moment, les groupes industriels et les gouvernements entendent poursuivre coûte que coûte et même étendre l’utilisation de l’énergie atomique bien que celle-ci soit dangereuse. Ainsi, le groupe nucléaire français Areva construit en France et en Chine de nouveaux réacteurs, le groupe allemand EON en construit en Finlande, tandis que RWE est responsable de la construction d’un modèle russe en Bulgarie. Dans ce cadre, la sécurité de la population est secondaire. La priorité des capitalistes va à la sécurisation de leurs profits : les Allemands construisent en Bulgarie un réacteur situé dans une région présentant d’importants risques sismiques. Depuis des décennies, toutes sortes de matières radioactives et toxiques sont déversées dans le site dit d’« enfouissement » de Asse, alors qu’il est de notoriété publique que des infiltrations d’eau le rendent complètement inapproprié à un tel usage.

    Dans le cas de la Bulgarie comme d’Asse, il est clair comme de l’eau de roche que les hommes et les femmes politiques et les scientifiques de l’industrie nucléaire ont été achetés. Et ce business vaut le coût pour la mafia nucléaire franco-allemande : rien que pour la poursuite de l’exploitation des 17 centrales nucléaires allemandes, les quatre groupes allemands du secteur de l’énergie tablent sur un profit de plus de 200 milliards d’euros. Pour y parvenir, l’industrie nucléaire, partout dans le monde, fait peu de cas des vies humaines. Pourtant, ce n’est pas cette énergie criminelle des groupes industriels qui est poursuivie par la justice franco-allemande. Non, au lieu de cela on criminalise des personnes parce que quelques crochets ont été jetés sur les lignes à haute tension du réseau ferré pour stopper enfin cette folie de la mafia nucléaire.

    La résistance internationale pousse les autorités hors du bois.

    En novembre dernier, alors que des déchets nucléaires allemands étaient convoyés par conteneurs de type castor depuis la France jusqu’à Gorleben en Basse-Saxe, des actions de protestation et de résistance ont eu lieu en France et en Allemagne. De nombreuses manifestations, des actions de blocages des voies ferrées et de sabotage des lignes ferroviaires en Allemagne et en France ont occasionné des dommages s’élevant à plusieurs millions d’euros. Plus d’un millier de trains ont été retardés. Ce n’est que grâce à un encadrement policier au coût exorbitant, et après plus de vingt heures de retard par rapport à l’itinéraire prévu, que le convoi a pu atteindre le site de stockage intermédiaire de Gorleben — site qui n’est rien d’autre qu’une grange à pommes de terre bien aérée.

    Côté allemand, des installations signalétiques avaient été mises hors d’usage. En France, des actions de sabotage des lignes à haute vitesse ont semé le chaos dans la circulation du week-end à la SNCF. Plusieurs trains ont dû s’arrêter, plus d’un millier ont connu des retards. À l’origine de cela, deux crochets suspendus à la ligne à haute tension séparant le trolley de l’alimentation électrique au passage du train. Dans un communiqué rédigé en allemand et envoyé notamment au journal Taz, les actions dans les deux pays sont expliquées de la manière suivante : « Parce que nous en avons assez, nous avons au petit matin dirigé notre colère contre le réseau de transport de déchets nucléaires ». Peu après, une grande vague de perquisitions et d’arrestations est menée dans le petit village de Tarnac et dans d’autres endroits. Neuf personnes sont arrêtées, certaines d’entre elles sont maintenues pendant des mois en détention provisoire.

    Les autorités françaises et une partie des médias parlent sans aucune retenue de terrorisme et établissent un lien avec les enquêtes contre une soi-disant « mouvance anarcho-autonome », label sous lequel il avait été procédé à de nombreuses arrestations en France depuis janvier 2008. À l’origine, des actions contre les centres de rétention, la participation aux mouvements d’opposition à la réforme de l’éducation — très forts en France — ainsi qu’aux manifestations consécutives à l’élection présidentielle. Dans ce contexte, un petit livre dont l’un des inculpés est soupçonné d’être co-auteur a aussi semé l’émoi. Intitulée L’insurrection qui vient, cette œuvre parle de rébellion contre un présent aussi irréel que désolant et lance un appel à se préparer concrètement à une révolte imminente. Les autorités réagissent à ce livre avec beaucoup de nervosité. Elles tirent le signal d’alarme quand des hommes et des femmes créent des réseaux internationaux pour s’opposer à la folie atomique, climatique et capitaliste avec tout ce qu’elle impose. Ce que nous considérons comme pure nécessité, la partie adverse l’appelle en choisissant ses mots « terrorisme », « Internationale de la révolte » ou actions de brutaux casseurs.

    En Italie aussi, peu avant le sommet du G8 des tenants du pouvoir résolus à décider entre eux de la politique mondiale, deux camarades ont été incarcérés pour tentatives de sabotage des lignes ferroviaires avec des crochets. Eux aussi sont soupçonnés d’appartenir avec 35 autres personnes à une « Internationale de la révolte ». Nous les saluons ainsi que tous ceux qui ne veulent laisser aucun répit !

    L’enquête en France se poursuit. Toutes les personnes concernées ont été relâchées — tout en restant soumises à des obligations très strictes comme l’interdiction d’avoir des contacts entre elles, des assignations à résidence etc. — ou elles s’étaient soustraites à leur arrestation. La tenue d’un procès n’est pas encore fixée.

    L’amitié franco-allemande contre les enquêtes franco-allemandes.

    Pour ce qui est de l’affaire de Tarnac et des actions de sabotages contre les lignes ferroviaires pendant le transport par Castor, les autorités françaises saisies de l’enquête entendent manifestement poursuivre leurs investigations en Allemagne. Deux autonomes berlinois ont reçu les invitations d’un juge à être entendus ici comme témoins dans le cadre d’un complément d’enquête venant de France. Un rapport de la police anti-terroriste française sur l’affaire de Tarnac du début de l’année mentionnait déjà ces deux personnes. Le passage correspondant évoque la pratique largement répandue en Allemagne de sabotage des transports de déchets nucléaires à l’aide de crochets. Les autorités allemandes ont informé leurs collègues français d’une procédure d’enquête baptisée « les crochets dorés » et levée depuis longtemps, procédure incriminant entre autres les deux personnes invitées à être entendues aujourd’hui. Une autre personne doit être prochainement entendue à Hambourg. Les deux militants anti-nucléaires de Berlin ne feront aucune déclaration. Ils ne souhaitent fournir aux autorités aucune information que ce soit pour l’enquête contre la résistance anti-nucléaire et contre ceux que l’on érige en mouvement criminel parce qu’ils s’engagent contre une politique criminelle. Nous vous invitons au contraire à accompagner les deux personnes au tribunal de Tempelhofer Damm. Nous nous saisissons de l’occasion qui ne nous est pas librement offerte pour faire part en ce jour d’invitation judiciaire, depuis un Berlin encore bien trop calme, de notre solidarité avec les camarades de Tarnac.

    Montrer les griffes au système – ici, là et ailleurs : ils ne passeront pas ! Notre solidarité contre la répression ! Nos luttes contre leur politique ! Solidarité !

berlin_le_singe_en_jauneblogCe que le singe a dit avant son arrestation :

    « Je suis ce que je suis » — telle est la dernière offre de la publicité au monde. Des décennies de développement pour en arriver là où nous sommes. Une pure tautologie. « Je suis ce que je suis. » Mon corps m’appartient. Je suis moi, et tu es toi, et quelque chose ne va pas.

    Quelle que soit la perspective sous laquelle on l’envisage, le présent n’offre aucune issue. Nous sommes tous d’accord sur le fait que les choses ne peuvent qu’empirer. « L’avenir n’a pas d’avenir », telle est la sagesse d’une époque qui, dans sa normalité parfaite, atteint le niveau de conscience des premiers punks. Enfin !

    Nous sommes ici aux côtés de nos amiEs dont l’État français, sous le label de « mouvance anarcho-autonome », veut la peau. Et deux d’entre nous devraient les y aider ? En tant que témoins ? Mais ils ne vont pas bien ! Jamais ! Nous sommes ici devant l’ambassade parce que nous avons un message à transmettre : pas à l’État, pas à la justice. À nos amiEs et à tous ceux qui se sentent reliés à eux. Ce qui nous relie, c’est de ne pas nous adresser à la politique dominante, de ne pas la critiquer, de ne vouloir l’aider d’aucune manière à s’améliorer. Nous voulons l’abolir et avec elle, toute l’administration destructrice du monde, parce c’est notre vie, et que nous allons la reconquérir.

    Comme nos amiEs, nous nous en tenons à ce que tous savent et dont personne ne souhaite vraiment parler — que cela ne CONTINUERA pas comme cela, que cet ordre mondial basé depuis 500 ans sur le meurtre et le pillage de l’humanité et de la nature fonce droit dans le mur : économiquement, écologiquement, socialement, mentalement, c’est-à-dire à tous les niveaux.

    On ne peut plus continuer à s’agiter, à produire des preuves. Les preuves elles-mêmes sont depuis longtemps une marchandise, une fin en soi préservant le système, une stratégie d’évitement de toute conséquence logique et éthique. Avec les médias révélant sans cesse les mêmes terribles destins et un public sans cesse capable de faire comme s’il découvrait pour la première fois l’horreur des noyades des réfugiés, des villes bombardées, de la catastrophe climatique — pour affoler brièvement, s’assurer de la fatalité de la situation et de sa propre impuissance, avant de retourner en toute quiétude à leurs affaires — personne ne doute plus sérieusement que ceci ne sera plus possible bien longtemps. Ça va péter !

    Ça va péter !

    Et tout à coup, il y a à nouveau des livres dangereux. L’un d’entre eux, L’insurrection qui vient, fait en ce moment l’objet d’une lecture attentive de la part des autorités sécuritaires françaises. Dans le bourbier réactionnaire des États-Unis, il soulève une indignation de premier ordre. Ces livres parlent de rupture avec l’ambiance apocalyptique quotidienne de la modernité finissante et du combat pour notre vie. D’en finir avec l’activisme poussif de la gauche traditionnelle et plus loin, de commencer aujourd’hui à se révolter.

    L’insurrection qui vient commence par les castrations nous maintenant dans le chœur de ceux qui s’époumonent d’autant plus haut dans les aigus sur le psaume de « There is no alternative », que tout le blabla insensé sur la valorisation craque de toute part sans qu’on ne l’entende et que des voix enfin claires sont audibles dans la rue. Il ne persiste pas dans sa représentation de la misère. S’il la décrit, c’est au contraire pour nous permettre de nous y reconnaître nous-même, d’y reconnaître nos propres expériences et notre égarement. Il ne s’agit pas d’une explication mais de résonance. De se trouver et de développer une langue commune qui ne soit pas plus longtemps compatible avec le commando. Quiconque se retrouve dans le vide décrit, dans le déchirement et la désolation, et souhaite en finir avec cela, est invité à continuer à réfléchir à la manière de venir à bout de la misère.

    L’insurrection qui vient constitue une proposition stratégique pratique. Il prend pour cible la fragilité interne du régime, fragilité dissimulée par toutes les forces du pouvoir. Malgré une stabilité toute apparente, celui-ci continue en effet à dépendre aujourd’hui comme hier de la motivation des travailleurs et de ce qu’aucune clé à écrous ne tombe dans ses rouages. Sa vulnérabilité à ce niveau a encore cru ces dernières années. Elle réside dans les cadences élevées de la production just-in-time, des réseaux d’énergie et de transport, des flux d’information.

    Il s’agit de reconnaître sa propre force dans les faiblesses de l’adversaire, de réfléchir aux possibilités de se soustraire à cet appareil en roue libre afin de s’engager ensemble pour quelque chose de meilleur. Pour créer des liens entre bandes combatives se gardant de reproduire les erreurs du passé : elles savent la nécessité pour la préparation d’actes de sabotage de construire des structures propres. Parce que les supermarchés ne pourront être pillés qu’aussi longtemps qu’il y a encore quelque chose à l’intérieur, la carotte est nécessaire autant que le poing, le combat contre l’existant doit s’accompagner de la recherche pratique d’un tout radicalement autre. Des bandes combatives reconnaissant dans la liberté des uns la colonne vertébrale des groupes — et réciproquement.

    Des groupes se reliant les uns aux autres, qui veulent tout absolument au même moment et refusent clairement tout atermoiement. Reconnaître pour condition le fait que nous vivons au cœur d’une guerre sociale globale dans laquelle nous devons prendre position d’une façon ou d’une autre. Alors pourquoi ne pas oser un nouveau départ, ne pas tenter d’organiser notre vivre ensemble sur cette planète de façon à ce que chacun en retire quelque chose ? Plus sérieusement : y-a-t il encore un quelconque argument en faveur de la conservation de l’expérience ratée du capitalisme ?

    Comparé à la détermination avec laquelle les communautés indiennes bloquent les voleurs de ressources naturelles au Pérou, comparé à la froide menace des ouvriers français de faire sauter leur entreprise en faillite s’il n’obtiennent pas quelques ronds pour la suite de la vie, comparé au réalisme d’émeutes dépourvues de revendications et pas seulement celles de la jeunesse pauvre de la métropole, comparé à tous ces managers de crises de l’Empire avec leurs sèches paroles d’encouragement déjà dépassées aujourd’hui tels les porteurs de perruques poudrés de l’ancien régime — on ne peut que déplorer qu’ils soient aussi bien armés.

    Pourtant, l’insurrection qui vient est peut-être la moins sanglante de toutes les possibilités envisageables…

28 juillet 2009

Hausse vertigineuse des écoutes téléphoniques

    Les écoutes téléphoniques pratiquées en France à la demande des magistrats ont été multipliées par plus de quatre depuis 2001, mais le chiffre reste encore loin de ceux d'autres pays de l'Europe de l'Ouest.

    Selon une étude universitaire dont rend compte Le Figaro dans son édition de mardi 28 juillet, disponible dès lundi sur le site internet du quotidien, les interceptions téléphoniques judiciaires ont augmenté de 440 % entre 2001 et 2008, passant de 5 845 en 2001 à 26 000 en 2008. "De quoi grever le budget de la Chancellerie", souligne le quotidien : les opérateurs et leurs prestataires facturent 497 euros hors taxes chaque interception sur une ligne fixe, et 88 euros hors taxes celles sur un téléphone mobile.

    Sur le même sujet Il convient d'ajouter à ces écoutes demandées par les magistrats les 5 906 écoutes judiciaires dites "administratives" effectuées pour la seule année 2008. Ces dernières sont pratiquées par divers services de renseignement - la DGSE, la DCRI (contre-espionnage) ou encore la Direction nationale de recherches des enquêtes douanières (DNRED) - sans feu vert de la justice. "Leur objectif vise à détecter toute atteinte à la sécurité nationale, à prévenir les visées terroristes ou certaines affaires d'intelligence économique", précise Le Figaro. L'étude souligne également que les services secrets interceptent de plus en plus souvent les échanges de mails.

    Soulignant que toutes ces interceptions ne font l'objet d'aucun contrôle émanant d'organisme indépendant, l'étude évoque une "menace pour la vie privée". Malgré cette hausse vertigineuse, la France demeure l'un des pays européens qui pratique le moins d'interceptions judiciaires - quinze fois moins que l'Italie, douze fois moins que les Pays-Bas et trois fois moins qu'en Allemagne.

Dans le Monde.fr du 28/07/09

20 juillet 2009

La prison à la maison ? quelques notes sur le contrôle judiciaire...

   Le contrôle judiciaire a été créé en 1970. Présenté à l’époque comme une alternative à la détention provisoire, il permet au juge de garder une personne sous la main de la justice en attente du procès sans pour autant remplir les prisons. Souvent présenté comme une façon d’échapper à la prison, il permet à l’État d’avoir le contrôle sur une personne suspectée. En ce sens, il constitue une autre forme de sanction, qui vient s’ajouter à l’incarcération et étend les possibilités de la justice pour contrôler et punir. En fait, le contrôle judiciaire s’ajoute doublement à la prison : d’abord parce que, de fait, les prisons sont toujours aussi pleines, on n’envoie pas moins de gens en prison, ensuite parce que la période passée sous contrôle judiciaire n’est pas comptabilisée dans la condamnation (contrairement à la détention provisoire), elle s’ajoute à la période d’incarcération. Concrètement, le juge choisit parmi un panel de règles et d’obligations : pointages réguliers dans un commissariat (de une fois par mois à une fois par jour), suivi social (obligation de travailler ou de rechercher un emploi), interdiction de se rendre dans certaines parties du territoire, interdiction de voir certaines personnes, restrictions d’horaires, interdiction de quitter son domicile, obligation de soin, interdiction de se déplacer hors du cadre autorisé sans l’avis du juge d’instruction…

    Toutes ses règles personnalisées multiplient les raisons d’être incarcéré (ou réincarcéré) car ne pas les respecter peut être puni de plusieurs mois de prison. Elles sont des contraintes qui agissent sur le quotidien : une partie assure « l’insertion sociale », l’autre la surveillance pure et simple. Les dispositifs voués à la mise au travail et au contrôle se développent sur toute la population. La fonction sociale de la prison est de gérer la misère et d’être un repoussoir pour tous afin d’accepter l’exploitation. Sous couvert d’objectifs d’insertion, le suivi social ressemble bien souvent à une mise au travail forcée. Ainsi, les dispositifs du contrôle judiciaire sont similaires à ceux du contrôle des chômeurs, où le moindre faux pas peut être suivi d’une suppression d’Assedic ou autres allocations. Ce sont autant de rendez-vous qui rappellent à l’ordre et contraignent à accepter n’importe quel boulot. Bien déçu celui qui pense y trouver une activité épanouissante, il n’y trouvera que travail de merde et discipline. Le contrôle judiciaire est toujours un contrôle des déplacements et des fréquentations, dans une dépendance permanente aux instances judiciaires. Les projets personnels sont, dès lors, placés sous leur surveillance et soumis à leur accord. Ainsi, dans beaucoup d’affaires, des proches sont considérés comme des complices et il est interdit de les rencontrer, ce qui a pour conséquence d’isoler et de briser les liens. Parfois même, le contrôle judiciaire interdit de se rendre dans le territoire de son lieu d’habitation. Cette surveillance est facilitée et renforcée par un maillage policier resserré sur tout le territoire. L’ensemble de la population est régulièrement contrôlé : la vidéosurveillance se développe encore, jusque dans les rames de métro et les halls d’immeuble, les téléphones portables permettent de suivre à la trace et de connaître le carnet d’adresse ; dans les transports en commun la puce du « pass navigo » permet d’obtenir des informations sur l’identité, les droits sociaux, les stations empruntées ; sur les routes la sécurité routière est un bon prétexte aux contrôles ; dans les rues les contrôles au faciès vont bon train. Les contrôles de douane ne se font plus seulement aux frontières mais sur tout le territoire. Les frontières se matérialisent à chaque contrôle de papier au travers duquel certains passent et d’autre non. En prison, les interdictions et l’absence de liberté sont palpables à chaque instant à travers les murs et les barreaux. Avec le contrôle judiciaire, chacun est sommé d’intérioriser les interdits et les obligations. A l’instar de bien d’autres aspects de notre société au premier rang desquels le salariat, le contrôle judiciaire participe de cette intériorisation de la résignation, de cette auto-discipline qui doit faire accepter à chacun de rester à sa place et de ne pas faire de vagues. Ceci a pour objectif de neutraliser toute volonté d’émancipation et de révolte face au fonctionnement de cette société. Les assignations à résidence et les interdictions de rencontrer des proches favorisent l’isolement, le repli sur soi et la limitation des déplacements au trajet domicile/travail, ce qui représente pour le pouvoir le mode de vie idéal pour contrôler et gérer la population. Comme face à toute mesure visant à soumettre et à contrôler chacun, que ce soit dans les transports, au travail ou à la CAF, il existe de multiples formes de résistances et de contournements des mesures du contrôle judiciaire. Toutes sortes d’arrangements, de magouilles et d’esquives permettent de ne pas se soumettre en permanence, de continuer à vivre et donnent pleins de raisons de ne pas se résigner. Dans chaque procédé de contrôle, il y a toujours des failles et ce n’est pas l’accumulation de ces mesures coercitives qui entameront la détermination à lutter pour une société libérée de l’exploitation et de l’enfermement.

    Les personnes mises en examen évoquées dans cette brochure font toutes l’objet d’une même affaire juridique qui a débuté en janvier 2008 notamment pour transport de fumigènes et de clous tordus, et tentative d’incendie d’une dépanneuse de police lors des élections présidentielles.

    Une brochure relate plus précisément ces affaires et esquisse quelques analyses : “Mauvaises intentions n° 1 et 2”. Vous pouvez la recevoir gratuitement par courrier en envoyant un mail à solidaritesinculpes@riseup.net ou la consulter directement sur internet à l’adresse : http://infokiosques.net/mauvaises_intentions Cette adresse permet aussi de se tenir au courant des dernières nouvelles.

 

Brochure (pdf de 8 pages) à télécharger en pièces jointes, imprimer et faire tourner... Brochure_sur_le_controle_judiciaire

Brochure_sur_le_controle_judiciaire___imprimer

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6 juillet 2009

Fox News fait de la pub pour "L'insurrection qui vient"

A quelques semaines de la publication en anglais du livre, un chroniqueur de la chaine ultraconservatrice Fox News appelle à lire ce texte dangereux afin de «connaître l'ennemi».

Source : Libération.fr du 03/07/2009

21 juin 2009

Deux ou trois choses que j'avais à vous dire, par Yldune Lévy

C'est un homme, dans un bureau, comme tant d'autres hommes dans tant d'autres bureaux auxquels il ressemble sans ressembler à rien. Celui-là dispose d'un pouvoir spécial, certainement dû au fait que son bureau occupe le dernier étage d'une quelconque tour d'un palais de justice.

 

On dit qu'il instruit, qui ? quoi ? Il instruit. Il écroue. Il interroge. Il rend des ordonnances, de pâles ordonnances, où quelques articles de loi, une poignée de formules convenues et de considérations vagues se concluent par d'impénétrables mesures de contrôle judiciaire. Benjamin, certainement trop apprécié comme épicier à Tarnac, sera assigné à résidence chez sa mère en Normandie, où il n'a jamais vécu, à 30 ans. Manon et moi, qui partagions tout à Fleury, n'avons plus le droit de nous voir maintenant que nous sommes "libres". Julien peut se mouvoir dans toute la couronne parisienne, non traverser Paris, au cas où lui viendrait la tentation de prendre d'assaut l'Hôtel de Ville, sans doute.

 

Tel ami qui le visitait au parloir de la Santé doit se garder de le croiser désormais, sous peine de réincarcération. L'homme au bureau construit un dédale de murs invisibles, un labyrinthe d'impossibilités factices où nous sommes censés nous perdre, et perdre la raison. Il y a un ordre dans cet écheveau d'absurdités, une politique de désorientation sous les accents neutres du judiciaire.

 

On nous libère en prétextant qu'il n'y a pas de "risque de concertation frauduleuse" pour ensuite nous interdire de nous voir et nous exiler ici ou là, loin de Tarnac. On autorise un mariage tout en en faisant savamment fuiter le lieu et la date. On fragnole (1), à coup sûr, mais pas seulement.

 

C'est par ses incohérences qu'un ordre révèle sa logique. Le but de cette procédure n'est pas de nous amener à la fin à un procès, mais, ici et maintenant, et pour le temps qu'il faudra, de tenir un certain nombre de vies sous contrôle. De pouvoir déployer contre nous, à tout instant, tous les moyens exorbitants de l'antiterrorisme pour nous détruire, chacun et tous ensemble, en nous séparant, en nous assignant, en starifiant l'un, en faisant parler l'autre, en tentant de pulvériser cette vie commune où gît toute puissance.

 

La procédure en cours ne produit qu'incidemment des actes judiciaires, elle autorise d'abord à briser des liens, des amitiés, à défaire, à piétiner, à supplicier non des corps, mais ce qui les fait tenir : l'ensemble des relations qui nous constituent, relations à des êtres chers, à un territoire, à une façon de vivre, d'oeuvrer, de chanter. C'est un massacre dans l'ordre de l'impalpable. Ce à quoi s'attaque la justice ne fera la "une" d'aucun journal télévisé : la douleur de la séparation engendre des cris, non des images. Avoir "désorganisé le groupe", comme dit le juge, ou "démantelé une structure anarcho-autonome clandestine", comme dit la sous-direction antiterroriste, c'est dans ces termes que se congratulent les tristes fonctionnaires de la répression, grises Pénélope qui défont le jour les entités qu'ils cauchemardent la nuit.

 

Poursuivis comme terroristes pour détention de fumigènes artisanaux au départ d'une manifestation, Ivan et Bruno ont préféré, après quatre mois de prison, la cavale à une existence sous contrôle judiciaire. Nous acculer à la clandestinité pour simplement pouvoir serrer dans nos bras ceux que nous aimons serait un effet non fortuit de la manoeuvre en cours.

 

Ladite "affaire de Tarnac", l'actuelle chasse à l'autonome ne méritent pas que l'on s'y attarde, sinon comme machine de vision. On s'indigne, en règle générale, de ce que l'on ne veut pas voir. Mais ici pas plus qu'ailleurs il n'y a lieu de s'indigner. Car c'est la logique d'un monde qui s'y révèle. A cette lumière, l'état de séparation scrupuleuse qui règne de nos jours, où le voisin ignore le voisin, où le collègue se défie du collègue, où chacun est affairé à tromper l'autre, à s'en croire le vainqueur, où nous échappe tant l'origine de ce que nous mangeons, que la fonction des faussetés, dont les médias pourvoient la conversation du jour, n'est pas le résultat d'une obscure décadence, mais l'objet d'une police constante.

 

Elle éclaire jusqu'à la rage d'occupation policière dont le pouvoir submerge les quartiers populaires. On envoie les unités territoriales de quartier (UTEQ) quadriller les cités ; depuis le 11 novembre 2008, les gendarmes se répandent en contrôles incessants sur le plateau de Millevaches. On escompte qu'avec le temps la population finira par rejeter ces "jeunes" comme s'ils étaient la cause de ce désagrément. L'appareil d'Etat dans tous ses organes se dévoile peu à peu comme une monstrueuse formation de ressentiment, d'un ressentiment tantôt brutal, tantôt ultrasophistiqué, contre toute existence collective, contre cette vitalité populaire qui, de toutes parts, le déborde, lui échappe et dans quoi il ne cesse de voir une menace caractérisée, là où elle ne voit en lui qu'un obstacle absurde, et absurdement mauvais.

 

Mais que peut-elle, cette formation ? Inventer des "associations de malfaiteurs", voter des "lois anti-bandes", greffer des incriminations collectives sur un droit qui prétend ne connaître de responsabilité qu'individuelle. Que peut-elle ? Rien, ou si peu. Abîmer à la marge, en neutraliser quelques-uns, en effrayer quelques autres. Cette politique de séparation se retourne même, par un effet de surprise : pour un neutralisé, cent se politisent ; de nouveaux liens fleurissent là où l'on s'y attendait le moins ; en prison, dans les comités de soutien se rencontrent ceux qui n'auraient jamais dû ; quelque chose se lève là où devaient régner à jamais l'impuissance et la dépression. Troublant spectacle que de voir la mécanique répressive se déglinguer devant la résistance infinie que lui opposent l'amour et l'amitié. C'est une infirmité constitutive du pouvoir que d'ignorer la joie d'avoir des camarades. Comment un homme dans l'Etat pourrait-il comprendre qu'il n'y a rien de moins désirable, pour moi, que d'être la femme d'un chef ?

 

Face à l'état démantelé du présent, face à la politique étatique, je n'arrive à songer, dans les quartiers, dans les usines, dans les écoles, les hôpitaux ou les campagnes, qu'à une politique qui reparte des liens, les densifie, les peuple et nous mène hors du cercle clos où nos vies se consument. Certains se retrouveront à la fontaine des Innocents à Paris, ce dimanche 21 juin, à 15 heures. Toutes les occasions sont bonnes pour reprendre la rue, même la Fête de la musique.

 

 

 

Etudiante, Yldune Lévy est mise en examen dans l'"affaire de Tarnac".

 

(1) Il manque assurément au vocabulaire français un verbe pour désigner la passion que met un assis à rendre, par mille manœuvres minuscules, la vie impossible aux autres. Je propose d'ajouter pour combler cette lacune à l'édition 2011 du Petit Robert le verbe "fragnoler" d'où découlent probablement le substantif "fragnolage", l'adjectif "fragnolesque" et l'expression argotique "T'es fragno !" dont l'usage est attesté et ne cesse de se répandre.

21 mars 2009

Message d'Ivan

    Aux camarades et amis,

    J’étais convoqué mercredi avec la prison garantie à la fin de l’interrogatoire. Je veux vous adresser quelques mots au moment où je suis contraint de disparaître, à chavirer le cours de ma vie, engluée au TGI de Paris. C’est la veille du jours où je pensais voir mon CJ descendre d’un cran, important, celui de l’assignation à résidence, que j’ai appris que des rapports de police bidonnés me signalaient à des manifs et rassemblements de solidarité avec Farid (surnom), réincarcéré depuis hier mercredi 11 à la Santé. Les procureurs voulaient nous voir enfermés tout comme la juge d’instruction qui nous avait promis la taule à la prochaine infraction de CJ. J’ai choisi de leur échapper.

    Que dire de cet acharnement, sinon que le CJ au-delà de tenir à disposition de la Justice, leur permet de sanctionner bien au-delà des faits jusqu’à nos attitudes. Et les juges d’argumenter sur la base de commentaires psychanalysant d’une assistante sociale à la fonction de contrôle ainsi explicitée :

    Que c’est de ne pas avoir renoncé à participer aux luttes qui nous traversent que la Justice se venge.

     Qu’aussi, les juges antiterro cherchent à tout prix des éléments pour justifier que nous figurions, avec mes co-mis en examen, dans une même association de malfaiteurs malgré l’absence de faits à nous reprocher en commun, et faire exister la figure de "l’anarcho-autonome". Et faire peser la menace d’une répression sans frein sur tous ceux qui se battent.

    C’est avec autant de joie que de douleur que je me soustrais à la fois à leur décision et à la vie que je menais. Je ne compte pas me cacher trop longtemps, ni même trop me cacher.

    A bientôt.

Yvan

Rappel des faits : Depuis janvier 2008, sept personnes sont mises en examen dans le cadre d’une instruction antiterroriste. Bruno, Ivan, Isa*, Farid*, Juan* (*surnoms) et Damien ont été successivement arrêté-e-s, mis-es en examen pour "association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste", réunie au sein d’un groupe inventé par la police : la MAAF (Mouvance Anarcho-Autonome Francilienne.) Certains d’entre neux sont accusés de "transport et détention de produits incendiaires ou explosifs", d’autres de "tentative de destruction de bien". Bruno et Ivan ont fait quatre mois et demi de prison (en préventive de mi-janvier à début juin 2008.) Farid a fait un peu plus de quatre mois de prison (en préventive également de mi-janvier à fin mai 2008) Tous trois ont été placés à leur sortie sous contrôle judiciaire. Bruno a décidé, début juillet 2008, de se soustraire à ce contrôle et est toujours en fuite. Isa, également incarcérée en janvier 2008, a été libérée sous contrôle judiciaire le 10 février 2009, plus d’un an après... Son frère, Juan, a été incarcéré en juin 2008. Il se trouve actuellement à la prison de Bois d’Arcy. Damien est emprisonné à Villepinte depuis le mois d’août 2008. Tous deux sont en préventive et aucune date de procès n’est fixée.

Source : Soutien aux inculpés du 11 novembre

16 mars 2009

Lettre de 8 des 9 inculpés de l’affaire de Tarnac, à leurs juges.

    Voilà quatre mois que le feuilleton médiatico-judiciaire intitulé l’"affaire de Tarnac" ne cesse de ne plus vouloir finir. Julien (Coupat) va-t-il sortir à Noël ? Pour le Nouvel An ? Aura-t-il plus de chance vendredi 13 ? Non, finalement on le gardera encore un peu en prison, enfermé dans son nouveau rôle de chef d’une cellule invisible. Puisqu’il semble que quelques personnes aient encore intérêt à faire perdurer cette mascarade, même au-delà du grotesque, il va nous falloir endosser, encore une fois, le rôle que l’on nous a taillé ("les 9 de Tarnac"), pour un nécessaire éclaircissement collectif. Alors voilà. ...

    Primo. Pendant que des journalistes fouillaient jusque dans nos poubelles, les flics reluquaient jusqu’à l’intérieur de nos rectums. C’est assez désagréable. Depuis des mois vous ouvrez notre courrier, vous écoutez nos téléphones, vous traquez nos amis, vous filmez nos maisons. Vous jouissez de ces moyens. Nous, les neuf, nous les subissons, comme tant d’autres. Atomisés par vos procédures, neuf fois un, alors que vous, vous êtes toute une administration, toute une police et toute la logique d’un monde. Au point où nous en sommes, les dés sont un peu pipés, le bûcher déjà dressé. Aussi, qu’on ne nous demande pas d’être beaux joueurs.

    Deuzio. Bien sûr vous avez besoin d’"individus", constitués en "cellule", appartenant à une "mouvance" d’une fraction de l’échiquier politique. Vous en avez besoin, car c’est votre seule et dernière prise sur toute une part grandissante du monde, irréductible à la société que vous prétendez défendre. Vous avez raison, il se passe quelque chose en France, mais ce n’est certainement pas la renaissance d’une "ultragauche". Nous ne sommes ici que des figures, qu’une cristallisation somme toute plutôt vulgaire d’un conflit qui traverse notre époque. La pointe médiatico-policière d’un affrontement sans merci que mène un ordre qui s’effondre contre tout ce qui prétend pouvoir lui survivre. Il va sans dire qu’à la vue de ce qui se passe en Guadeloupe, en Martinique, dans les banlieues et les universités, chez les vignerons, les pêcheurs, les cheminots et les sans-papiers, il vous faudra bientôt plus de juges que de profs pour contenir tout ça. Vous n’y comprenez rien. Et ne comptez pas sur les fins limiers de la DCRI pour vous expliquer.

    Tertio. Nous constatons qu’il y a plus de joie dans nos amitiés et nos "associations de malfaiteurs" que dans vos bureaux et vos tribunaux.

    Quarto. S’il semble aller de soi pour vous que le sérieux de votre emploi vous amène jusqu’à nous questionner sur nos pensées politiques et sur nos amitiés, nous ne nous sentons pas, quant à nous, le devoir de vous en parler. Aucune vie ne sera jamais absolument transparente aux yeux de l’Etat et de sa justice. Là où vous avez voulu y voir plus clair, il semble plutôt que vous ayez propagé l’opacité. Et l’on nous dit que, désormais, pour ne pas subir votre regard, ils sont toujours plus nombreux ceux qui se rendent à des manifestations sans téléphone portable, qui cryptent les textes qu’ils écrivent, qui font d’habiles détours en rentrant chez eux. Comme on dit : c’est ballot.

    Quinto. Depuis le début de cette "affaire", vous avez semblé vouloir accorder beaucoup d’importance au témoignage d’un mythomane, aussi appelé "sous X". Vous vous obstinez, c’est courageux, à accorder un peu de foi à ce ramassis de mensonges, et à cette pratique qui a fait l’honneur de la France il y a quelques décennies - la délation. C’en serait presque touchant, si ça ne conditionnait pas l’accusation de chef à l’encontre de Julien, et donc son maintien en détention. Si ce genre de « témoignage » ne justifiait pas des arrestations arbitraires – à l’occasion, par exemple, de quelques balles envoyées par la Poste, ou sur la police, dans l’Hérault, ou à Villiers-le-bel.

    Enfin, étant entendu que la marge de liberté qu’il nous reste est désormais fort réduite, que le seul point à partir duquel nous pouvons nous soustraire à votre emprise réside dans les interrogatoires auxquels vous nous soumettez à intervalles réguliers. Que Julien s’est déjà vu refuser quatre demandes de remise en liberté. Qu’il est notre ami. Qu’il n’est rien de plus que ce que nous sommes. Nous décidons qu’à partir de ce jour, dans l’héroïque tradition d’un Bartleby, "nous préférerons ne pas". En gros, nous ne vous dirons plus rien et cela jusqu’à ce que vous le libériez, jusqu’à ce que vous abandonniez la qualification de chef pour lui et de terrorisme pour nous tous. En résumé, jusqu’à ce que vous abandonniez les poursuites.

    Pour tous ceux qui, là où ils sont, se battent et ne se résignent pas. Pour tous ceux que le ressentiment n’étouffe pas et qui font de la joie une question d’offensive. Pour nos amis, nos enfants, nos frères et nos soeurs, les comités de soutien. Pas de peur, pas d’apitoiement. Pas de héros, pas de martyrs. C’est précisément parce que cette affaire n’a jamais été juridique qu’il faut transporter le conflit sur le terrain du politique. Ce que la multiplication des attaques d’un pouvoir toujours plus absurde appelle de notre part, ce n’est rien d’autre que la généralisation de pratiques collectives d’autodéfense partout où cela devient nécessaire.

    Il n’y a pas neuf personnes à sauver mais un ordre à faire tomber.

Aria, Benjamin, Bertrand, Elsa, Gabrielle, Manon, Matthieu, Yldune sont, avec Julien Coupat, mis en examen dans l’"affaire de Tarnac".

(Publié aussi dans le journal Le Monde, du 17 mars).

13 mars 2009

Encore un déni de justice !

    Cette fois encore, la chambre de l'instruction a rejeté la demande de remise en liberté effectuée par Julien Coupat, honteusement inculpé pour "association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste". Il va donc rester en détention à la prison de la Santé, où il est enfermé depuis quatre mois. Selon les propos de Me Irène Terrel, son avocate, "...il s'agit d'un déni de justice, d'un déni des principes du droit" [...], Julien Coupat est "le bouc émissaire d'un fiasco judiciaire", Et c'est le moins qu'on puisse dire, en effet, face à l'acharnement politico-judiciaire dont il est l'objet.

    La lutte continue, nous n'oublierons pas les prisonnières et les prisonniers pendant la grève générale et l'insurrection qui vient.

Comité Stéphanois contre les lois anti-terroristes et la civilisation spectaculaire-marchande

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