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Amour, émeute et cuisine
Amour, émeute et cuisine
  • Quelques pensées sur la civilisation, considérée dans ses aspects politiques, "philosophiques", et culinaires, entre autres. Il y sera donc question de capitalisme, d'Empire, de révolte, et d'antiterrorisme, mais aussi autant que faire se peut de cuisine.
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31 mars 2021

Poèmes saturniens

Paul Verlaine, Poèmes Saturniens

Poèmes saturniens, de Paul Verlaine.

4e de couverture : Mon rêve familier

Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant
D'une femme inconnue, et que j'aime, et qui m'aime
Et qui n'est, chaque fois, ni tout à fait la même
Ni tout à fait une autre, et m'aime et me comprend.

Car elle me comprend, et mon coeur, transparent
Pour elle seule, hélas ! cesse d'être un problème
Pour elle seule, et les moiteurs de mon front blême,
Elle seule les sait rafraîchir, en pleurant.

Est-elle brune, blonde ou rousse ? - Je l'ignore.
Son nom ? Je me souviens qu'il est doux et sonore
Comme ceux des aimés que la vie exila.

Son regard est pareil au regard des statues,
Et, pour sa voix, lointaine, et calme, et grave, elle a
L'inflexion des voix chères qui se sont tues.

Prologue : Dans ces temps fabuleux, les limbes de l'histoire,
Où les fils de Raghû, beaux de fard et de gloire,
Vers la Ganga régnaient leur règne étincelant,
Et, par l'intensité de leur vertu troublant
Les Dieux et les Démons et Bhagavat lui-même,
Augustes, s'élevaient jusqu'au Néant suprême.
Ah ! la terre et la mer et le ciel, purs encor
Et jeunes, qu'arrosait une lumière d'or
Frémissante, entendaient, apaisant leurs murmures
De tonnerres, de flots heurtés, de moissons mûres,
Et retenant le vol obstiné des essaims,
Les Poëtes sacrés chanter les guerriers saints,
Ce pendant que le ciel et la mer et la terre
Voyaient, - rouges et las de leur travail austère, -
S'incliner, pénitents fauves et timorés,
Les guerriers saints devant les Poëtes sacrés !
Une connexité grandiosement alme
Liait le Kchatrya serein au Chanteur calme,
Valmiki l'excelent à l'excellent Rama :
Telles sur un étang deux touffes de Padma

- Et sous tes cieux dorés et clairs, Hellas antique,
De Sparte la sévère à la rieuse Attique,
Les Aèdes, Orpheus, Alkaïos, étaient
Encore des héros altiers, et combattaient.
Homéros, s'il n'a pas, lui, manié le glaive,
Fait retentir, clameur immense qui s'élève,
Vos échos jamais las, vastes postérités,
D'Hektôr, et d'Odysseus, et d'Akhilleus chantés.
Les héros à leur tour, après les luttes vastes,
Pieux, sacrifiaient aux neuf Déesses chastes,
Et non moins que de l'art d'Arès furent épris
De l'Art dont une Palme immortelle est le prix,
Akhilleus entre tous ! Et de Laêrtiade
Dompta, parole d'or qui charme et persuade,
Les esprits et les coeurs et les âmes toujours,
Ainsi qu'Orpheus domptait les tigres et les ours.

- Plus tard, vers des climats plus rudes, en des ères
Barbares, chez les Francs tumultueux, nos pères,
Est-ce que le Trouvère héroïque n'eut pas
Comme le Preux sa part auguste des combats ?
Est-ce que, Théroldus ayant dit Charlemagne,
Et son neveu Roland resté dans la montagne,
Et le bon Olivier et Turpin au grand coeur,
En beaux couplets et sur un rythme âpre et vainqueur,
Est-ce que, cinquant ans après, dans les batailles,
Les durs Leudes perdant leur sang par vingt entailles,
Ne chantaient pas le chant de geste sans rivaux
De Roland et de ceux qui virent Roncevaux
Et furent de l'énorme et superbe tuerie,
Du temps de l'Empereur à la barbe fleurie ?...

- Aujourd'hui, l'Action et le Rêve ont brisé
Le pacte primitif par les siècles usé,
Et plusieurs ont trouvé funeste ce divorce
De l'Harmonie immense et bleue et de la Force.
La Force, qu'autrefois le Poëte tenait
En bride, blanc cheval ailé qui rayonnait,
La Force, maintenant, la Force, c'est la Bête
Féroce bondissante et folle et toujours prête
À tout carnage, à tout dévastement, à tout
Égorgement, d'un bout du monde à l'autre bout !
L'Action qu'autrefois réglait le chant des lyres,
Trouble, enivrée, en proie aux cent mille délires
Fuligineux d'un siècle en ébullition,
L'Action à présent, - ô pitié ! - l'Action,
C'est l'ouragan, c'est la tempête, c'est la houle
Marine dans la nuit sans étoiles, qui roule
Et déroule parmi les bruits sourds l'effroi vert
Et touge des éclairs sur le ciel entr'ouvert !

- Cependant, orgueilleux et doux, loin des vacarmes
De la vie et du choc désordonné des armes
Mercenaires, voyez, gravissant les hauteurs
ineffables, voici le groupe des Chanteurs
Vêtus de blanc, et des lueurs d'apothéoses
Empourprent la fierté sereine de leurs poses :
Tous beaux, tous purs, avec des rayons dans les yeux,
Et sous leur front le rêve inachevé des Dieux !
Le monde, que troublait leur parole profonde,
Les exile. À leur tour ils exilent le monde !
C'est qu'ils ont à la fin compris qu'il ne faut plus
Mêler leur note pure aux cris irrésolus
Que va poussant la foule obscène et violente,
Et que l'isolement sied à leur marche lente.
Le Poëte, l'amour du beau, voilà sa foi,
L'Azur, son étendard, et l'idéal, sa loi !
Ne lui demandez rien de plus, car ses prunelles,
Où le rayonnement des choses éternelles
A mis des visions qu'il suit avidement,
Ne sauraient s'abaisser une heure seulement
Sur le honteux conflit des besognes vulgaires
Et sur vos vanités plates : et si naguères
On le vit au milieu des hommes, épousant
Leurs querelles, pleurant avec eux, les poussant
Aux guerres, célébrant l'orgueil des Républiques
Et l'éclat militaire et les splendeurs auliques
Sur la kithare, sur la harpe et sur le luth,
S'il honorait parfois le présent d'un salut
Et daignait consentir à ce rôle de prêtre
D'aimer et de bénir, et s'il voulait bien être
La voix qui rit ou pleure alors qu'on pleure ou rit,
S'il inclinait vers l'âme humaine son esprit,
C'est qu'il se méprenait alors sur l'âme humaine.

- Maintenant, va, mon Livre, où le hasard te mène !

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26 mars 2021

L'empire du Troll

Jean-Claude Dunyach, L'empire du Troll

L'empire du Troll, de Jean-Claude Dunyach.

4e de couverture : Cette fois, le Troll est vraiment dans de sales draps.
Entre les idées de grandeur de sa chère et tendre qui lui valent d'être expulsée de son salon de coiffure, les nains de la mine qui ont subitement décidé de ne plus assez creuser et son stagiaire qui tente de se reconvertir dans la protection rapprochée, sa vie est devenue un cauchemar.
Il lui faut d'urgence trouver de l'or en quantité suffisante pour sauver ce qui peut l'être. Une seule solution : cambrioler un dragon... Mais pas n'importe lequel : le plus gros, le plus rusé. Il faut donc réunir l'équipe habituelle de bras cassés et se lancer à l'assaut des passages secrets de la montagne, malgré les dangers sans nombre qui les guettent.
Mais dans les ombres, les forces du mal veillent. Et elles ont fait appel à des avocats.

Incipit : Toute ressemblance avec des crises financières récentes caractérisées par des décisions d'une bêtise et d'une avidité rares ne saurait être qu'une pure coïncidence. Aucun troll n'est assez stupide, lâche ou inconscient pour provoquer ce genre de situation.

Extrait n°1 : Depuis mon aventure dans les entrailles du volcan, chaque fois que j'ai une remontée de gaz, il me vient de nouvelles idées de management.

Extrait n°2 : S'il y a une chose que les militaires savent faire, c'est marcher au pas. Au lieu de se faire bêtement la guerre avec des épées coupantes et des cottes mal taillées, les humains devraient régler leurs conflits par des concourts de défilés. Il y aurait des uniformes chamarrés, ajustés pour mettre en valeur leurs muscles ou leurs reliefs, de la musique rythmée, un char ou deux. Ou douze. On pourrait y aller en famille ; le soir, tout le monde rentrerait chez soi. Mais c'est une idée trop compliquée pour eux, visiblement. Avec le bruit que font leurs armes, ils ne s'entendent plus penser.

Extrait n°3 : "Un alchimiste ? Vous voulez dire un de ces sorciers qui produisent de l'or à partir de n'importe quoi ? (Elle s'est gratté la tête.) Ici, c'est une équipe de consultants en management. Ils font plutôt le contraire..."

Extrait n°4 : - On n'est pas des sournois, réplique un des jeunes. C'est un stéréotype racial dépassé qui ne reflète plus la réalité de ce que nous vivons au quotidien. En tout cas, moi je n'en suis pas un. Et tous les nains que je connais non plus.
Des manches de pioche s'abattent en rythme sur le comptoir pour renforcer sa déclaration. Je hoche la tête avec réticence. Je vais devoir faire preuve de pédagogie.
- En fait, réponds-je, vous êtes aveuglés par les discours bien-pensants de ceux qui vous manipulent en sous-main. On vous encourage depuis le plus jeune âge à croire en l'image idéalisée de vous-mêmes que la société vous renvoie. Le côté siffler en travaillant, grand coeur dans un petit corps, ça vous donne un genre et ça peut vous aider à vous sentir bien dans votre peau, mais personne n'est dupe, et surtout pas moi. Les faits sont là : potentiellement, vous êtes des sournois. C'est dans votre nature.
- #notallnains !

25 mars 2021

De la brièveté de la vie

Sénèque, De la brièveté de la vie

De la brièveté de la vie, de Sénèque.

4e de couverture : "Nous pouvons discuter avec Socrate, douter avec Carnéade, trouver la paix avec Épicure, maîtriser la nature de l'homme avec les stoïciens, la dépasser avec les cyniques. Puisque la Nature nous permet de communiquer avec n'importe quelle époque, pourquoi ne pas quitter cet étroit et éphémère passage de notre vie et ne pas nous lancer de tout notre être dans ces espaces illimités, éternels, où nous pouvons côtoyer ceux qui sont meilleurs que nous ? Aucun d'eux ne sera avare de son temps, aucun ne manquera de renvoyer son visiteur plus heureux et plus en paix avec soi-même qu'à son arrivée, aucun ne laissera quiconque repartir les mains vides."

Extrait n°1 : [...] il en est qui, à force de présenter leurs respects à leurs supérieurs sans être payés de retour, s'usent dans une servitude volontaire.

Extrait n°2 : Quel stupide oubli de sa condition de mortel que de remettre à son cinquantième ou soixantième anniversaire les saines résolutions et de vouloir commencer sa vie à un âge qu'atteignent peu de gens !

Extrait n°3 : Il faut être un grand homme, crois-moi, un homme au-dessus des égarements humains, pour ne rien laisser prélever sur son temps et si sa vie est très longue, c'est précisément parce que, quelle que fût sa durée, elle est restée à sa libre et entière disposition.

Extrait n°4 : La vie se divise en trois périodes : ce qui a été, ce qui est, ce qui sera. Parmi ces trois périodes, celle que nous sommes en train de vivre est brève, celle que nous vivrons est incertaine, celle que nous avons vécue est certaine.

Extrait n°5 : Pour certains, c'est leur oisiveté qui est accaparée par les occupations : dans leur propriété ou dans leur lit, en pleine solitude, bien qu'ils se soient retirés du monde, ils s'importunent eux-mêmes ; il ne faut pas parler à leur sujet de vie oisive mais de désoeuvrement encombré d'occupations. L'appelles-tu vraiment oisif, celui qui range avec une méticulosité maladive ses bronzes de Corinthe qui ne doivent tout leur prix qu'à la folie d'une poignée de gens, et qui perd le plus clair de son temps au milieu de morceaux de métal rouillé ? Et celui qui s'assied à la palestre (car hélas ! pour notre plus grande honte, les vices qui nous accablent ne sont même pas romains !) pour contempler des garçons à la lutte ? Et celui qui apparie ses chevaux selon le critère de l'âge et de la couleur du pelage ? Et celui qui entretient les toutes dernières révélations de l'athlétisme ?

Extrait n°6 : C'est grâce à l'effort de ces autres gens que nous sommes guidés vers de merveilleuses vérités qu'ils ont arrachées aux ténèbres puis produites en pleine lumière ; toutes nous sont accessibles et s'il nous plaît par générosité d'âme de franchir les limites étroites de la faiblesse humaine, nous avons la possibilité de parcourir une vaste étendue de temps.

25 mars 2021

Manifeste pour une psychiatrie artisanale

Emmanuel Venet, Manifeste pour une psychiatrie artisanale

Manifeste pour une psychiatrie artisanale, d'Emmanuel Venet.

4e de couverture : Ce livre aurait pu s'intituler Contre une psychiatrie industrielle, quantitative, protocolisée, standardisée, numérisable, objectivante, désincarnée, ultrarapide et inégalitaire. L'heure est grave : le pouvoir politique abandonne la psychiatrie publique à sa misère, plusieurs ténors de la profession militent pour instaurer une rationalisation managériale, et les malades les plus fragiles font les frais d'un économisme sanitaire totalement dénué d'état d'âme. Constat inquiétant, lorsqu'on sait qu'un Français sur trois a été, est, ou sera atteint d'un trouble mental.

Mais il n'est pas trop tard pour restaurer une psychiatrie artisanale, prévenante, lente et respectueuse des singularités des personnes qu'elle soigne.

C'est de cet espoir que ce livre procède.

Extrait n°1 : Il y a plus grave : de nombreux psychiatres universitaires profitent du désarroi et de la souffrance des institutions de soins pour proposer des solutions qui, sous les apparences du bon sens et de l'efficacité, visent à en finir avec des approches thérapeutiques présentées comme obsolètes, inopérantes, voire délétères. En première ligne dans leur collimateur, la psychanalyse et la psychothérapie institutionnelle.

Extrait n°2 : Depuis plusieurs années cette approche est subrepticement remplacée par une psychiatrie du symptôme venue d'Amérique du Nord, dont l'objectif se résume à gommer les phénomènes s'écartant de la norme sans chercher à en comprendre les enjeux profonds ni même à les contextualiser. Cette approche, qui permet de transformer aisément l'acte de soin en prestation de service, fait le lit d'une psychiatrie du risque qui nous arrive sournoisement et qui pourrait disqualifier l'ensemble du soin psychique par ses effets néfastes sur la société tout entière. On se souvient du rapport de l'INSERM qui prétendait, en 2005, établir des critères prédictifs d'une évolution vers la délinquance ches les enfants de moins de trois ans, illustration d'une démarche non seulement indigente sur le plan scientifique, mais terriblement dangereuse.

Extrait n°3 : De sorte que si le secteur psychiatrique est toujours présenté comme la priorité absolue de la psychiatrie publique, c'est surtout par ses fossoyeurs.

Extrait n°4 : Si elle donne à la population l'illusion d'une meilleure prise en compte de la sécurité publique, cette organisation reflète une régression consternante de la pratique soignante : de moins en moins suivis et accompagnés au quotidien par les structures sectorielles de proximité, les malades psychiatriques présentent de plus en plus de troubles comportementaux graves, justifiant le recours à des services disciplinaires dont ils sortent avec l'étiquette de grand fauve collée au front. En matière de prévention de la stigmatisation, on a fait mieux.

Extrait n°5 : Tout se passe comme si, aveuglés par leur aversion pour l'héritage de la psychanalyse, de la psychothérapie institutionnelle et de la démarche clinique, ils n'avaient à coeur que de prouver la nature strictement médicale de leur spécialité. C'est oublier un peu vite que si la psychyatrie appartient au champ de la médecine, elle en est la spécialité la plus noblement bâtarde : certes en lien avec la neurophysiologie, mais ouverte à la philosophie et aux sciences sociales. En outre, elle est, plus que toute autre spécialité médicale, porteuse d'enjeux politiques cruciaux : la place du fou dans la société, l'espace accordé à l'anormalité, une déclinaison concrète de l'égalité inscrite dans la devise nationale.

Extrait n°6 : Mais je tiens pour une utopie dangereuse l'idée selon laquelle il serait un jour possible d'assigner des phénomènes aussi complexes que la pensée, l'affectivité ou la conscience morale à un déterminisme génétique précis ou à des phénomènes neuronaux observables.

10 mars 2021

Le Bachelier

Jules Vallès, Le Bachelier

Le Bachelier, de Jules Vallès.

4e de couverture : Inspiré de la vie de Vallès lui-même, le roman nous entraîne dans le sillon de Jacques Vingtras, bachelier qui monte à Paris, où il rencontre espoirs politiques et désillusions amoureuses. Mais Le Bachelier est aussi une anti-biographie : Vallès ne pouvait se contenter de dresser le portrait d'un jeune homme ; il fait de l'irruption de l'élan révolutionnaire dans la vie du héros le véritable sujet de son livre.
Anticlérical et révolutionnaire, ce roman est avant tout une prise de position de l'écrivain pour la multitude des bas-fonds. Au traditionnel roman de formation, Vallès superpose un camaïeu de voix : cris des rues et titres de journaux font intrusion dans la conscience du narrateur et concourent à la bouleverser.
Acte d'insurrection romanesque, Le Bachelier rend leur voix à ceux que l'histoire littéraire avait réduits au silence.

Extrait n°1 : J'ai peur que tout au moins un professeur, un marchand de langues mortes n'arrive s'installer auprès de moi comme un gendarme.
Mais non, il n'y a qu'un gendarme sur l'impériale, et il a des buffleteries couleur d'omelette, des épaulettes en fromage, un chapeau à la Napoléon.
Ces gendarmes-là n'arrêtent que les assassins ; ou, quand ils arrêtent les honnêtes gens, je sais que ce n'est pas un crime de se défendre. On a le droit des les tuer comme à Farreyrolles ! On vous guillotinera après ; mais vous êtes moins déshonoré avec votre tête coupée que si vous aviez fait tomber votre père contre un meuble, en le repoussant pour éviter qu'il ne vous assomme.

Extrait n°2 : "Eh bien, oui, j'ai eu tort ! L'imprimeur s'appelle Fessequedoit ou Vadelavant ! J'ai eu tort... Il faut d'abord agir, et ne pas jeter des bâtons dans les roues du char qui porte la Révolution."

Extrait N°3 : Oh ! ma jeunesse ! Je t'avais délivrée du jug paternel, et je t'amenais fière et résolue dans la mêlée !
Il n'y a plus de mêlée ; il y a l'odeur de la vie servile, et ceux qui ont des voix de stentor doivent se mettre une pratique de polichinelle dans la bouche. C'est à se faire sauter le caisson, si l'on ne se sent pas le courage d'être un lâche !

Extrait n°4 : Mes luttes contre l'Empire se terminent toutes par des courbatures - des blessures piteuses font saigner mes pieds. C'est bête et honteux comme la fatigue d'un âne.

Extrait n°5 : J'ai quelquefois sauvé le grain du pauvre en apparaissant sur les bords d'un champ, couvert et la barbe au vent... Je faisais peur aux oiseaux et j'étais utile à l'agriculture. Sainte mission !

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6 mars 2021

...dans la perspective d'une vie passionnante

Dans la perspective d'une vie passionnante

...dans la perspective d'une vie passionnante

6 mars 2021

Alerte : la Grèce à nouveau en ébullition !

 

01 Grèce

Bonsoir,


La Grèce à nouveau en ébullition. Un prisonnier politique en grève de la faim et de la soif est sur le point de mourir, 40 ans après la mort de Bobby Sands dans l’indifférence cruelle de Margaret Thatcher. Ce serait une première en Union Européenne et cela provoque beaucoup de débats, de tensions, d’actions, d’occupations, de manifestations… Ce soir encore, des milliers de personnes ont rompu le couvre-feu pour aller manifester, des bâtiments publics ont été occupés et des lieux de pouvoir attaqués. La tension ne cesse de monter et elle est palpable un peu partout ici.

02 Grèce

Dimitris Koufontinas est en prison depuis 20 ans pour avoir participé dans sa jeunesse aux actions du groupe communiste révolutionnaire 17 novembre au sein duquel il a assassiné pour la plupart des anciens collaborateurs grecs et américains de la dictature des Colonels. Le nom du groupe provient du jour où le régime a tiré sur les insurgés autour de l’École Polytechnique, dans le quartier d’Exarcheia à Athènes, le 17 novembre 1973, avec des tanks et de l’armement lourd. Après la chute de la dictature, la purge n’a jamais été faite et beaucoup d’anciens responsables de la junte sont restés dans les arcanes du pouvoir. Voilà l’argument qu’a donné à l’époque Dimitris Koufontinas pour, selon lui, venger les victimes du 17 novembre. Quand ce groupe a été démantelé, il y a 20 ans, Koufontinas s’est rendu de lui-même pour ne pas faire porter le chapeau à ses camarades arrêtés et assumer sa part de responsabilité. À partir de 2010, selon la Loi grecque, il avait la possibilité de bénéficier de permissions qui ne lui ont finalement été accordées qu’à partir de 2017, sous Tsipras, ce qui lui a permis de voir son fils Hector du fait de sa « bonne conduite » en prison et de sa ponctualité. Après un bras de fer de plusieurs semaines début 2019, il a également été transféré dans une prison rurale aux activités agricoles en plein air.
03 Grèce

Cette année, il aurait pu solliciter une remise en liberté conditionnelle dès l’automne. Mais depuis que la droite a gagné les élections en juillet 2019, les choses ont changé. L’une des victimes de Koufontinas était le beau-frère du nouveau premier ministre, Kyriakos Mitsotakis, qui n’a pas manqué de faire voter une loi spéciale en décembre 2020 visant uniquement Koufontinas. Cette loi l’empêche désormais de revoir son fils, de poursuivre sa détention dans sa prison rurale et d’entrevoir la perspective d’une libération conditionnelle dans les prochains mois ou années. Étrangement, les prisonniers néo-nazis d’Aube Dorée n’ont pas été frappés par cette loi postérieure à leur condamnation, du fait d’une subtilité glissée dans le texte : cette loi vise les personnes poursuivies pour « terrorisme » (Koufontinas), mais pas pour « participation à une organisation criminelle » (les aube doriens). Après avoir épuisé les recours, Koufontinas s’est mis en grève de la faim puis de la soif. Depuis samedi, il refuse également l’hydratation apportée par les perfusions d’antibiotique. Il va donc mourir dans les prochaines heures, si le gouvernement continue de s'acharner.
04 Grèce

Malgré l’intervention de très nombreux collectifs, associations (dont Amnesty international), organisations (anarchistes, communistes révolutionnaires, etc.), partis politiques (dont Syriza, Diem25, KKE, Antarsya, etc.), personnalités (dont Costa Gavras), Mitsotakis et son gouvernement ne veulent rien entendre : ils se servent de leur pouvoir pour satisfaire leur vengeance et attendent l’issue mortelle du bras de fer. Interpellée par beaucoup d’entre nous, la présidente grecque s’est murée dans le silence depuis une semaine et laisse faire Mitsotakis.
05 Grèce

Comme vous l’aurez compris, il ne s’agit pas d’avoir une opinion ou une autre sur Koufontinas et sur ses actes d’il y a une trentaine d’années. Il s’agit simplement de ne pas laisser faire un pouvoir qui devient absolu et se permet de régler ses comptes comme s’il avait rétabli la peine de mort. Voilà pourquoi la principale association de juristes et d’avocats, ainsi que la fédération des médecins hospitaliers sont engagées dans cette lutte pour faire reculer le pouvoir, avant qu’il ne soit trop tard.
06 Grèce

Depuis quelques jours, le mouvement social est volcanique dans une atmosphère qui rappelle les années passées. Certains prédisent une explosion de violence si Dimitris Koufontinas finit par mourir de sa grève de la faim : des émeutes avec une incidence politique probable. À l’heure qu’il est, Koufontinas semble condamné. Le bras de fer est sans appel. Le pouvoir ne veut rien entendre, malgré l’immense protestation qui s’étend dans le pays. Difficile d’imaginer ce qui va se passer.
07 Grèce

Si vous voulez suivre ce qui se passe, je vous propose une info en temps réel sur mon blog, au cœur de cette lutte : http://blogyy.net (site gratuit, bien sûr)

Voici les derniers articles à ce sujet (avec infos, analyses, photos et vidéos) :

Samedi 27 février / Koufontinas : la Grèce retient son souffle
http://blogyy.net/2021/02/27/koufontinas-la-grece-retient-son-souffle/

Samedi 27 février / Lettre à Katerina Sakellaropoulou, présidente de la République Hellénique
http://blogyy.net/2021/02/27/lettre-a-katerina-sakellaropoulou-presidente-de-la-republique-hellenique/

Dimanche 28 février / Grèce : la violence du pouvoir génère la révolte et la répression
http://blogyy.net/2021/02/28/grece-la-violence-du-pouvoir-genere-la-revolte-et-la-repression/

Dimanche 28 février / « Je ne veux pas mourir, mais vu la situation, ils ne me laissent pas le choix»
http://blogyy.net/2021/02/28/je-ne-veux-pas-mourir-mais/

Lundi 1er mars / Actions et occupations se multiplient en Grèce
http://blogyy.net/2021/03/01/actions-et-occupations-se-multiplient-en-grece/

Lundi 1er mars / Des rassemblements nombreux en Grèce
http://blogyy.net/2021/03/01/des-rassemblements-sont-nombreux-en-grece/
08 Grèce

Voilà, merci de vos messages de soutien. Bon courage à vous en cette période étouffante. Puissent nos expériences un peu partout sur la planète nous aider à comprendre ce qui nous arrive et à nous libérer du pouvoir qui nous piétine.

Amicalement,

Yannis Youlountas

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