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Amour, émeute et cuisine
Amour, émeute et cuisine
  • Quelques pensées sur la civilisation, considérée dans ses aspects politiques, "philosophiques", et culinaires, entre autres. Il y sera donc question de capitalisme, d'Empire, de révolte, et d'antiterrorisme, mais aussi autant que faire se peut de cuisine.
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insurrection
22 novembre 2016

A l'abordage !

Rassemblement devant le siège des Républicains à Paris

Dimanche 27 novembre 2016

à

19h30

 Avec Fillon, la droite s'avance à visage découvert : ultra-libéralisme barbare et moisissure identitaire, tel est son nouveau cocktail décomplexé, qui aura pour effet d'achever la destruction des conquêtes sociales, de lever les dernières entraves au déchaînement capitaliste, et d'accentuer encore un peu plus la persécution raciste et islamophobe. Or qui se présentera face à lui dans quelques mois ? Hollande, Macron, Le Pen ? La perspective du 2ème tour est aux yeux de tous révoltante et intolérable. En réalité c'est tout le système de la politique classique, c'est tout le cadre du parlementarisme et de la représentation qui est en voie d'obsolescence terminale. Nous avons décidé de rompre définitivement avec tout cela, d'entamer une pratique politique autonome, soustraite à la capture de l'État, de chercher les moyens concrets de s'organiser, ici et maintenant, dans la perspective de sa dissolution. Nous avons l'intention de fêter à notre manière le résultat de la primaire, d'en faire le premier acte de notre assaut contre la présidentielle, le prologue de notre affirmation commune. Alors, retrouvons-nous, déterminés et nombreux, dimanche prochain 27 novembre à 19h30 devant le siège des Républicains. Que cette campagne devienne le cauchemar de ceux qui nous gouvernent ! À l'abordage ! (cf : ici)

abordage-1024x678

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18 novembre 2016

Urgent Grèce : Evénement en cours à Athène

URGENT GRÈCE : ÉVÉNEMENTS EN COURS À ATHÈNES !!!

A suivre en direct ici : http://blogyy.net/2016/11/17/live-en-direct-des-mass-medias-en-grece-sur-les-evenements-en-cours-a-athenes/

Plus tôt dans l'après-midi : http://blogyy.net/2016/11/17/43-ans-apres-on-occupe-lecole-polytechnique

Tout a commencé mardi soir : http://blogyy.net/2016/11/16/nuit-rouge-et-noire-a-athenes-3

et http://blogyy.net/2016/11/15/ca-va-chauffer-ce-soir-a-athenes

Ils nous croyaient à genoux, écrasés par la dette et l'austérité, soumis et résignés, mais une fois de plus, rien n'est fini en Grèce ! On compte sur vous pour le faire savoir. Aidez-nous à contrer la désinformation et le silence assourdissant en France, en Belgique et ailleurs... Merci ! Y.Y. et d'autres occupants de l'Ecole polytechnique à Exarcheia

30 juillet 2016

Sous la plage de Paris...

Sous la plage de Paris

8 juillet 2016

Sous la plage de Paris, du goudron et des pavés !

Sous la plage de Paris

22 juin 2016

Chant contre l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes

Chant contre l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes

"Notre-Dame des oiseaux de fer"

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18 juin 2016

Car révolution n'est pas un mot dans nos bouches, mais un feu dans notre cœur

« Quatre jours de débat autour du casseur invisible, puis une semaine autour de la police et de ses méthodes. C’est, à tout prendre, la meilleure manière de ne pas parler de ce qui se passe en ce moment même, dans tant de villes du pays. »


Quoi ? Depuis que vous êtes établi en corps du peuple, vous n’avez pas encore le secret d’obliger tous les riches à faire travailler tous les pauvres ? Vous n’en êtes donc pas aux premiers éléments de la police."

Voltaire

 

La lumière de la publicité obscurcit tout. C’est sa vocation. Mais il y a des moments où le caractère dilatoire du débat public atteint un point de comble. Tout se qui s’y dit ajoute à la confusion, jusqu’à ce que celle-ci soit totale ; il est temps alors de se reposer et de partir en week-end. Nous venons de vivre dix jours d’un tel paroxysme. Quatre jours de débat autour du casseur invisible, puis une semaine autour de la police et de ses méthodes. C’est, à tout prendre, la meilleure manière de ne pas parler de ce qui se passe en ce moment même, dans tant de villes du pays.

Faut-il commencer par dire ce qui est, puis donner à voir les stratégies visant à le recouvrir, ou décrire d’abord le théâtre des opérations gouvernementales et seulement ensuite l’obscur objet de tant de manœuvres ? Pour une fois, on choisira la première méthode d’exposition.

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Ce qui se passe en ce moment en France, on l’a assez dit, ne peut être décrit comme un « mouvement », a fortiori comme un « mouvement social », dont on pourrait guetter la fin et disserter chaque semaine sur les signes qui l’annoncent. Nous sommes entrés dans une phase politique de plateau, un moment de forte intensité conflictuelle qui durera jusqu’à la présidentielle et qui prendra des formes, traversera des luttes très différentes durant cette période ; et qui aura effectivement eu pour signal de départ la loi de trop – la loi « travaille ! ». Ce qui se passe depuis le 9 mars, c’est que des forces autonomes sont en train de s’agréger. Ce qui ne cesse de croître depuis lors, ce n’est ni la combativité des centrales syndicales, ni le nombre des participants aux AG de Nuit Debout, mais la masse de manifestants déterminés à prendre la tête des cortèges officiels, en dehors de toute affiliation. Se donne alors à voir dans la rue un processus plus souterrain : la rencontre de semaine en semaine plus consistante entre des bandes de lycéens, d’étudiants, de syndicalistes sincères, de chômeurs, de salariés, de déçus de toutes sortes de provenance et dont le dénominateur commun est qu’ils sont déterminés à ne plus être gouvernés comme ils l’ont été, et pour certains à ne plus être gouvernés du tout. Si la police, les médias ou les services d’ordre des syndicats ont tant de mal avec cette agrégation qui tient désormais la tête des manifestations, c’est précisément parce qu’elle est inassignable, que chacun est ici sorti de sa case et que tout cela peut faire bloc, mais n’est pas un bloc. Nul n’est plus à sa place. Ici commence la fin du maintien de l’ordre.

C’est ce surgissement qui rend si fébrile le régime, et d’abord le ministère de l’Intérieur. Cette puissance qui ne cesse de passer des paliers – qui commence à occuper des lieux en dur, et non plus des places désertes, qui commence à maîtriser l’usage des banderoles renforcées, des cagoules, des masques à gaz et des grilles d’arbre en fonte pour débiter du pavé ou du bitume – vise le renversement de l’état de choses existant, et donc fatalement celui du régime. Son premier effet d’ensemble est de rendre impossible le lancement de la campagne présidentielle, tant l’intensité politique qu’elle porte s’impose à l’insignifiant « débat politique ». Sa victoire, si victoire il y a, résidera dans le fait de déployer une richesse de formes et de vie telle, dans l’année qui vient, que la politique telle que nous l’avons connue disparaîtra sans regret et l’élection présidentielle n’aura pas lieu. Elle a vocation à finir ce monde finissant mais qui voudrait bien encore finir pendant quelques siècles. Nous parlons d’un mélange de désertions, de luttes hors contrôle, de soulèvements, de destitutions, qui sont comme la conclusion logique à l’état de discrédit du personnel d’encadrement de cette société. Quoi de plus naturel que de renverser ceux dont le pouvoir vous semble obscène ? Or c’est cette question stratégique du soulèvement et de la destitution que viennent opportunément occulter tous les débats publics, toute les discussions en AG sur la question de la « violence », des « casseurs » et de la police. L’histoire nous apprend que l’on ne parle plus de la « violence » des insurgés dès lors qu’ils ont vaincu. S’il y a une question qui devrait occuper toutes nos discussions et solliciter toute notre intelligence, c’est de savoir comment nous allons réussir à renverser ce qui nous gouverne une fois pour toutes. Cette visée, au reste, est partagée par le plus sauvage des émeutiers comme par le plus pacifiste des votants de Nuit debout, quel que soit le désaccord sur les moyens à employer.

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Une fois cela posé, les événements des dix derniers jours sont infiniment plus lisibles.

Le 28 après-midi, le ministère de l’Intérieur commence à prendre la mesure de la force accumulée contre lui dans tout le pays, et de la rage qui l’habite : dans un grand nombre de villes, les manifestations ont viré à l’émeute. Les slogans entendus récapitulent dix années de mûrissement sous-jacent : dans la capitale, le « Paris, debout ! Soulève-toi ! » remonte des moments forts de la lutte anti-CPE tandis que « tout le monde déteste la police » atteste que la mort de Rémi Fraisse n’est pas en voie d’être pardonnée. Dans le même temps, Gazeneuve apprend qu’à la suite d’une opération lynchage menée par la BRI de Rennes – un groupe d’une trentaine de policiers a pris à revers, en empruntant le métro, un cortège de manifestants qui refluait pour l’attaquer de dos, sans sommation, et mettre en pièces ceux qui tenaient une banderole renforcée – un étudiant a perdu un œil : un flic lui a tiré dessus au LBD 40 à deux mètres de distance. Il faut en urgence communiquer, c’est-à-dire présenter une version du réel qui défie tant les faits que la plus simple logique mais qui semble, au prix d’une petite opération magique, tout à fait normale. En l’espèce, il faut d’un côté devancer l’effet de déflagration probable de ce qui s’est passé à Rennes et, de l’autre, livrer une explication des émeutes qui en limite la propagation. On monte donc en épingle le cas d’un policier en civil qui s’est fait casser la mâchoire à Paris lors d’une mauvaise manœuvre de maintien de l’ordre en disant qu’il est hospitalisé, « très grièvement blessé », « en urgence absolue », etc., puis, comme cela passe, on hausse à trois le nombre des fonctionnaires « grièvement blessés », et l’on s’empresse de dresser la martyrologie policière de la journée : des dizaines de policiers atteints, des centaines depuis le début du mouvement, un scandale – tout cela doit cesser. Il s’agit d’insinuer dans les esprits que c’est la police qui serait la véritable victime de ce mouvement, et non tous ceux qui se font régulièrement fracasser la tête à coups de matraques, éborgner à coups de flashball, gazer ou meurtrir la chair par des grenades de désencerclement. Puis on livre l’explication à tant de désordres : ce n’est pas que ce gouvernement aurait fini par s’attirer une haine éruptive d’à peu près tout le monde, ni que les gens trouveraient un peu olé-olé la loi qu’il compte de toute façon faire adopter, non : ce sont les « casseurs », et même un petit groupe de 200 casseurs « organisés », qu’il s’agit de réduire. Faire du problème public numéro 1 non plus le gouvernement lui-même, mais les « casseurs » et les moyens de les neutraliser, réclame une collaboration sans faille des médias. Or justement, ce qui étonne le gouvernement au premier chef, c’est comment son plan com’, pourtant grossier, fonctionne. Les médias, qui ne comprennent rien à ce qui se passe, mais savent bien qu’ils ont tout à y perdre, s’empressent de reprendre à leur compte toute la panoplie discursive que l’on a si gentiment préparée pour eux. On ne parlera plus, dès lors et pendant trois jours, que de policiers malmenés et de « black bloc », d’« anarchistes », d’« insurrectionnistes », d’« autonomes » - sorte de lie historique qui aurait toujours existé, qui semble se reproduire dans quelque bas-fonds inexplicable de l’histoire où elle mène sa vie parallèle et, telle les rats, investit la ville par vagues dès que l’autorité reflue ; alors elle casse tout sans motif, puis s’en retourne en silence dans son antre crasseuse et certainement souterraine. Ce plan com’ si réussi culmine avec la déclaration martiale de Gazeneuve où il menace, la veille du 1er mai, les manifestants – déclaration qui sonne comme un blanc-seing à la police de casser le nombre de crânes qu’il lui chante, comme au bon temps de Jules Moch, à l’occasion de la fête des travailleurs : « « Je veux indiquer à ceux qui sont dépourvus d’idéal et qui sont animés par le seul instinct de la violence qu’ils seront inlassablement interpellés et poursuivis par les forces de police et par la justice ». Dans le même temps, avec l’approche de l’examen de la loi à l’Assemblée, on entend sonner la fin de récré de « Nuit Debout ». Les organisateurs eux-mêmes sont lassés de ce spectacle qui tourne en rond, dont le processus est relativement incontrôlable et qui n’a plus à leur apporter que des ennuis et des désaveux. L’espoir de certains socialistes de trouver dans « Nuit Debout » un nouveau vivier à canaliser vers le processus présidentiel à coups d’incitation au « réalisme » a fait long feu. C’est ainsi qu’est décidé de vider une première fois manu militari, sans raison valable et sans sommation, la place de la République ce 28 avril au soir. On arguera, ici encore, ici toujours, de quelques « casseurs » inexistants. C’est un coup d’essai, au plan militaire autant que médiatique. Et là aussi, dans cette phase de grande veine, tout passe comme un courrier à la Poste. Les médias, dans l’ensemble absents de la place ce soir-là, reprennent à la virgule près la version policière et ne consacrent que peu de lignes à cette évacuation pourtant osée. En deux mots : tout baigne. Ce qui doit être dit est dit, ce qui doit être tu est tu. Les collègues journalistes font le job. Comme il est bon de bosser à la cellule « communication » de la place Beauvau, avec correspondant de l’AFP à demeure !

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Le terrain est préparé au mieux pour le 1er Mai. L’enchaînement envisagé est de nasser les « casseurs », puis, en ayant ainsi produit le sujet du désordre comme une réalité bien distincte des cortèges syndicaux, d’expulser la place de la République sous prétexte d’infiltration de « Nuit Debout » par ces mêmes « casseurs ». Manque de bol : si les forces autonomes qui tiennent depuis plus d’un mois la tête des cortèges syndicaux sont bien là, leur composition n’a pas la pureté des fantasmes policiers : ce ne sont pas 300 « black blocs » cagoulés et vêtus de noir des pieds à la tête, mais des milliers de manifestants quelconques qui, une fois encerclés, ont des amis dans tout le reste de la manifestation ; manifestation qui ne veut pas se laisser dérouter par la police afin d’isoler, voire contrôler, le cortège des « fauteurs de trouble » ainsi nassés. La tentative de délimiter les « autonomes », comme le 28 avril à Paris, ne marche pas, car il n’y a pas d’ « autonomes », il n’y a que des êtres qui se conduisent, en situation, de manière autonome. Celui qui dit « être autonome » a toujours-déjà cessé de l’être. Et c’est toute la manifestation qui arrive ainsi à la place de la Nation au cri de « nous sommes tous des casseurs » et « tout le monde déteste la police ». Ce qui ne constitue pas un franc succès, du point de vue policier. On expulsera et noiera quand même sous les gaz la place de la République, en arguant de provocations qui n’ont évidemment pas eu lieu. Mais il fallait bien dérouler le plan jusqu’au bout, même s’il ne marche pas ; et puisque l’on avait tout le dispositif sous la main à Nation, il eût été scandaleux de n’en pas faire usage à République. Autour du fiasco du 1er Mai, c’est tout le plan com’ du ministère qui s’est retourné contre lui-même. Tout comme on n’avait parlé que des « casseurs » dans les jours précédents, on n’a plus parlé par la suite que de la police, du maintien de l’ordre et des subtilités de cet art brutal – jusqu’à l’annonce de la manifestation des flics le 18 mai à République. La boucle est bouclée : la police se constitue en force autonome à son tour, en force autonome contre-révolutionnaire. Et elle vient au contact. La police n’est plus un simple instrument aux mains de gouvernants méprisés de tous : précisément parce qu’elle est le dernier levier entre leurs mains, elle est aussi devenue leur maître. Elle peut sans crainte accuser le régime d’être de mèche avec les « casseurs », laissant ainsi entrevoir le traitement qu’elle pourrait réserver, un de ces jours, aux uns comme aux autres. Le régime n’est plus qu’un joujou aux mains de sa police. On a coutume de se plaindre de l’impunité de celle-ci, c’est ne pas comprendre que son impunité est celle du souverain, tout comme son arrogance est celle du parvenu.

Stratégiquement, la situation est des plus simples : nous voulons destituer ce qui nous gouverne ; et ce qui gouverne veut se maintenir, à n’importe quel prix. Il n’y a pas de question de « violence » là-dedans : il y a deux volontés qui s’affrontent : nous voulons les renverser et ils ne le veulent pas. Libre à eux. L’affaire sera tranchée sous les yeux de tous. En attendant, il n’y a plus de position neutre : tous ceux qui s’expriment autour de ce qui gronde en France en ce moment se rangent d’un côté ou de l’autre, pour la destitution du gouvernement ou contre elle. Entre les deux, il n’y a rien. Car « révolution » n’est pas un mot dans nos bouches, mais un feu dans notre cœur.

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Original à lire sur LundiMatin

17 juin 2016

Pour en finir avec l'Empire-marchand...

Clou du spectacle

15 juin 2016

Nous ne voulons pas l'ersatz et la migraine !

Nous ne voulons pas l'ersatz et la migraine !

PDF ICI

De quelques considérations dans lesquels nous ne communiquerons pas sur la pseudo-violences de quelques manifestants lors de la manifestation parisienne du 14 juin 2016, mais où nous essaierons de contribuer modestement à la lutte en cours.


Une conscience sans scandale est une conscience aliénée.
G. Bataille, La littérature et le mal.

Nos seules manifestations, restant rares et brèves dans les premières années, voulaient être complètement inacceptables ; d'abord surtout par leur forme et plus tard, s'approfondissant, surtout par leur contenu.
G. Debord, Panégyrique


Exorde

Le haut degré de séparation/division entre les individus et l'objet de leurs « activités », entre les individus et la nature, et bien sûr entre les individus eux-mêmes, que les divers dispositifs de la domination marchande n'ont cessé d'imposer toujours plus profondément depuis plus de deux siècles, a commencé de vaciller ici et maintenant sur ses bases. La lutte « sociale » qui a débuté en France voici environ trois mois - et dont nous pouvons dire qu'elle s'inscrit, au moins partiellement, dans la continuité de celle qui en Grèce commença dans le courant de l'année 20091 - a d'ores et déjà en effet permis de rompre, quoique imparfaitement, avec un train-train quotidien mortifère où l'isolement de chacun ne l'enviait jamais en rien à la misère de cette survie qui, à peine assurée, était toujours de plus en plus connue de presque tous. Partout là où ne subsistait plus il y a peu qu'un sommeil peu reposant – tant il est vrai que le repos lui-même n'était plus guère consenti qu'à crédit -, reparaissent aujourd'hui la libre palabre et les débordements vitaux de la révolte.
Mais qu'un tel mouvement ait de quoi nous réjouir ne doit pas nous dispenser d'en observer en sus les limites et les failles ; la révolte n'est pas la révolution, moins encore l'assurance de sa victoire.


Nuit Debout

Ainsi avons-nous pu constater deux fâcheuses tendances lors des rassemblements dits de « Nuit Debout », deux fâcheuses tendances qui, à dire vrai, diffèrent bien plus quantitativement que qualitativement, puisqu'il est patent que si l'une apparaît le plus souvent à chaque fois qu'une grande quantité de personnes sont rassemblées, l'autre au contraire n'apparaît qu'au sein de réunions dont les participants vont s'avérer peu nombreux et, conséquemment, peu visibles.
La première tendance, qui consiste donc à multiplier inlassablement les assemblées générales et les votes, conduit nécessairement à reproduire ce qu'elle prétendait d'abord critiquer, en ceci qu'elle ne fait de toutes façons d'emblée qu'en reprendre les dispositifs pseudo-démocratiques réellement aliénés. Le vote, en effet, au contraire de la libre palabre évoquée ci-dessus, contraint souvent à des prises de décisions qui n'avaient rien d'indispensables et qui, de ce seul fait justement qu'elles n'étaient pas indispensables, s'avèrent fréquemment provoquer, à plus ou moins long terme, de la division ; laquelle division ne manquera pas bientôt de recréer les vieux clivages politiques nés de la falsification spectaculaire-marchande. De son côté, l'assemblée générale – qu'elle soit suivie d'un vote ou non -, d'être toujours déjà en elle-même une succession de courtes paroles écoutées sans répliques possibles ou presque, ne peut que finir en dernière analyse par générer chez la plupart des participants un ennui tel que l'épuisement ne tardera pas de les gagner bientôt. Comment, d'ailleurs, se pourrait-il qu'il en soit autrement pour des populations déjà si fatiguées par le système électif officiel qu'elles en sont heureusement venues à s'abstenir majoritairement d'aller aux urnes. Bref, à plus ou moins longue échéance, la forme « assemblée générale/vote » ne peut que finir par se coaguler en puissance abstraite-séparée répondant aux intérêts des quelques-uns sur place qui auront su, plus ou moins consciemment, faire accroire l'universalité de ces intérêts, ou défaire le mouvement en le replongeant dans le néant duquel il avait émergé.
La seconde tendance, qui n'exclut pas entièrement la première en tant au moins qu'elle ne s'affranchit pas toujours non plus du dispositif de la votation2, a toutefois de particulier ceci qu'elle s'apparente bien plutôt à des réunions « d'alcooliques anonymes » qu'à celle de conseils ouvriers ou de comités révolutionnaires. Non point fort heureusement qu'on s'y abstienne de boire pour y évoquer ses déboires avec la rinçonnette, mais on y expose à tour de rôle si volontiers ses névroses et indignations sui generis que parler là de simples conciliabules de « névrotiques anonymes » ne semble en rien outrancier. Or, quel que puisse être l'intérêt, parfois indéniable au sein d'un groupe et pour le groupe, de tels relations innervées de soi, l'expérience montre aussi combien de leur fastidiosité ne se dégage la plupart du temps que des silences gênés ; iceux silences ne manquent jamais de reléguer les meilleures aspirations révolutionnaires au mauvais rang de château en Espagne. En sorte qu'on n'aura toujours bientôt là encore d'autres choix que celui de retourner à la gestion neurasthénique de son frêle oikos, ou de se subsumer à nouveau sous une représentation séparée-abstraite. Et, tandis que la première tendance des « Nuit-Debout » permet au moins d'espérer générer l'existence d'un nouveau parti politique – cette coagulation en puissance abstraite-séparée répondant aux intérêts des quelques-uns sur place qui auront su, plus ou moins consciemment, faire accroire l'universalité de ces intérêts, tel que Syriza en Grèce ou Podemos en Espagne -, on n'aura ici d'autre espace politique où réassigner sa voix que sur l'un d'entre ceux qui font d'emblée partie de l'infrastructure marchande : le mélanchonisme, qui prépare, au cas où et comme ses coreligionnaires de Grèce et d'Espagne, la contre-révolution, risque fort en France de tirer dès lors son épingle du jeu.


Syndicalisme

Qui, cependant, continue de ne pas déposer son être sur le fond rogue d'un parti, trouve souvent, sur le chemin de sa révolte actuelle, divers syndicats l'invitant à se joindre à eux pour défendre ce qu'il est convenu d'appeler « les acquis sociaux » ou, selon une mode récente, « les conquis sociaux ». Mais - ainsi que nous l'avons déjà dit ailleurs - à quelques exceptions près, le syndicalisme, qui a toujours pris l'apparence de qui vise à améliorer la vie quotidienne, n'a réellement toujours déjà pour objet que le maintient de l'ordre existant ; la défense éternelle des « acquis » ou « conquis sociaux » ne dit d'ailleurs jamais rien d'autre que : - ce qui existe hic et nunc est bon, ce qui est bon existe hic et nunc ! En quoi le « there is no alternative » tatcherien ne serait pas loin, si n'était qu'il a toujours bien plus tâché d'atteindre à un ordre social existant augmenté3 plutôt que seulement stabilisé. Quoi qu'il en soit, la limite essentiel, à nos yeux, des syndicats, tient donc à ceci que l'idée de révolution leur est presque absolument étrangère4, et ce d'autant plus que leur structure interne, généralement proche de celle des partis politiques dits représentatifs, les invite à travailler d'abord comme ces derniers à maintenir leur propre existence, quitte à agir au contraire des intérêts de leurs adhérents.
Un syndicat, toutefois, ne trahit pas plus ses militants et sympathisants qu'un parti ses partisans et électeurs ; il est dans la nature même de tout organe hiérarchisé d’ouvrer prioritairement en faveur de sa hiérarchie. C'est pourquoi dans la lutte en cours il s'agit selon nous de ne s'associer au syndicats qu'avec parcimonie, lors des quelques moments où les intérêts des comités autonomes – lesquels devront toujours être anti-hiérarchiques dans leur forme comme dans leur contenu – se croisent avec les leurs.
Ne pas se diviser dans la bataille contre la domination ne signifie pas qu'il faille consentir à toute la vile industrie de tous ses ersatz, sans quoi nos lendemains risque une fois encore d'être faits de migraines.

Et c'est justement ce à quoi répond notre soi-disant violence qui, pour autant qu'elle ne veut plus du monde renversé n'en veut ni l'ersatz ni la migraine. Le pouvoir n'est pas à prendre, il est à détruire !

A bas le travail
A bas l'argent
A bas l'Empire-marchand

VIVE LA COMMUNE


Comité A.E.C, le 15 juin 2016


Notes :

1 – Que l'amorce de cette lutte fût bientôt l'occupation de quelques places publiques en témoigne suffisamment - Voir à cet égard notre texte La contre-insurrection qui vient, modestes propos sur la situation grecque. (http://ecoeuretcuisine.canalblog.com/archives/2015/05/04/31999592.html#comments)

2 – Votation ici plus dénuée encore de tout impact concret, pratique, tant le petit nombre de participants la voue aussitôt à sombrer dans le néant de la parole en l'air, où seule l'autosatisfaction d'avoir apparemment su décidé de quelque-chose – mais quoi – autorisera enfin chacun à retourner souriant à la gestion de son oikos intime.

3 – Nous parlons ici « d'ordre...augmenté » comme on parle ailleurs, chez les imbéciles transhumanistes pour être précis, « d'Homme augmenté ».

4 – Que la plupart des syndicats soient pour une bonne part financés par l’État en dit suffisamment long sur ce point.

 

detruisons-ce-qui-nous-detruit

 

 

25 novembre 2014

A nos amis

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A nos amis, du Comite Invisible, 2014.

4ième de couverture : A ceux pour qui la fin d'une civilisation n'est pas la fin dumonde; A ceux qui voient l'insurrection comme une brèche, d'abord, dans le règne organisé de la bêtise, du mensonge et de la confusion; A ceux qui devinent, derrière l'épais brouillard de "la crise", un théâtre d'opérations, des manoeuvres, des stratégies - et donc la possibilité d'une contre-attaque; A ceux qui portent des coups; A ceux qui guettent le moment propice; A ceux qui cherchent des complices; A ceux qui désertent; A ceux qui tiennent bon; A ceux qui s'organisent; A ceux qui veulent construire une force révolutionnaire, révolutionnaire parce que sensible; Cette modeste contribution à l'intelligence de ce temps.

Extrait n°1 : Nous ne sommes pas contemporains de révoltes éparses, mais d'une unique vague mondiale de soulèvements qui communiquent entre eux imperceptiblement. D'une universelle soif de se retrouver que seule explique l'universelle séparation. D'une haine générale de la police qui dit le refus lucide de l'atomisation générale que celle-ci supervise. Partout se lit la même inquiétude, la même panique de fond, à quoi répondent les mêmes sursauts de dignité, et non d'indignation.

Extrait n°2 : L'horizon de la catastrophe est ce à partir de quoi nous sommes présentement gouvernés. Or s'il y a bien une chose vouée à rester inaccomplie, c'est la prophétie apocalyptique, qu'elle soit économique, climatique, terroriste ou nucléaire. Elle n'est énoncée que pour appeler les moyens de la conjurer, c'est-à-dire, le plus souvent, la nécessité du gouvernement. Aucune organisation, ni politique ni religieuse, ne s'est jamais avouée vaincue parce que les faits démentaient ses prophéties. Car le but de la prophétie n'est jamais d'avoir raison sur le futur, mais d'opérer sur le présent : imposer ici et maintenant l'attente, la passivité, la soumission. Non seulement il n'y a pas d'autre catastrophe à venir que celle qui est déjà là, mais il est patent que la plupart des désastres effectifs offrent une issue à notre désastre quotidien.

Extrait N°3 : Le pouvoir contemporain est de nature architecturale et impersonnelle, et non représentative et personnelle. Le pouvoir traditionnel était de nature représentative : le pape était la représentation du Christ sur terre, le roi, de Dieu, le Président, du peuple, et le Secrétaire Général du Parti, du prolétariat. Toute cette politique personnelle est morte, et c'est pourquoi les quelques tribuns qui survivent à la surface du globe amusent plus qu'ils ne gouvernent. Le personnel politique est effectivement composé de clowns de plus ou moins grand talent ; d'où la réussite foudroyante du misérable Beppe Grillo en Italie ou du sinistre Dieudonné en France. A tout prendre, eux au moins savent vous divertir. Aussi, reprocher aux politiciens de "ne pas nous représenter" ne fait qu'entretenir une nostalgie, en plus d'enfoncer une porte ouverte. Les politiciens ne sont pas là pour ça, ils sont là pour nous distraire, puisque le pouvoir est ailleurs. [...] Le pouvoir, c'est l'organisation même de ce monde, ce monde ingénié, configuré, designé. Là est le secret, et c'est qu'il n'y en a pas.

3 juin 2014

LA COMMUNE (Paris 1871)

LA COMMUNE

(Paris 1871)

Un film de Peter Watkins (1999)

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